OU LE COMPLIMENT IMPROVISÉ
1858
Par l'Abbé E. GONNET.
AVIGNON LIBRAIRE DE CAILLAT-BELHOMME, Éditeur. Rue Saunerie, 15. PROPRIÉTÉ DE L'ÉDITEUR.
AVIGNON, typ. Jacquet, rue Saint-Marc, 22.
Texte établi par Paul FIÈVRE, février 2021
Publié par Paul FIEVRE, mars 2021
© Théâtre classique - Version du texte du 28/02/2024 à 23:49:33.
PERSONNAGES.
EUPHÉMIE.
PAULA.
JULIENNE.
La scène se passe dans une cour ombragée.
Extrait de "Dialogues en vers pour pensionnaires ou congrégations de jeunes demoiselles", 1er cahier, de l'Abbé Eugène Gonnet. pp 1-9
EUPHÉMIE OU LE COMPL...
SCÈNE I.
Euphémie, Paula.
EUPHÉMIE.
Oui, depuis ce matin, il me semble, à te voir,
Que tes yeux pétillants brillent d'un doux espoir.
Dis-moi, chère Paula, quelle cause inconnue
Soudain a relevé cette grâce ingénue
5 | Qui ne te quitte point. |
PAULA.
Tu m'étonnes, ma soeur ; |
Ou toi-même tu veux me cacher ton bonheur.
Quoi ! Tu n'éprouves pas la plus vive allégresse ?
Euphémie, et ton coeur....
EUPHÉMIE.
Non, non, rien ne l'oppresse.
D'ailleurs, aux noirs soucis l'on interdit ces bords ;
10 | Mais ma joie est bien loin d'égaler tes transports. |
PAULA.
Comment donc ? Si la joie est ton heureux partage,
Elle doit en ce jour éclater davantage.
EUPHÉMIE.
De grâce, explique-toi.
PAULA.
Ma chère, ignores-tu
Que nos coeurs désormais ont assez attendu ?
15 | Et que notre Pasteur, notre Père si tendre.... |
EUPHÉMIE.
Que dis-tu ? Monseigneur...
PAULA.
Ici daigne se rendre.
EUPHÉMIE.
Bien sûr ? Oh ! Quel bonheur !
PAULA.
Oui, pour nous contenter,
Sa Grandeur, à la fin, veut bien nous visiter.
EUPHÉMIE.
C'est vrai : depuis longtemps, notre timide enfance
20 | Aspirait à jouir de sa douce présence. |
PAULA.
Et Dieu seul connaissait l'impatiente ardeur
Des soupirs enflammés qu'exhalait notre coeur.
EUPHÉMIE.
Je ne m'étonne plus, si ta joie est si vive.
Mais pourquoi ta nouvelle est-elle si tardive ?
25 | Car, tu sais qu'il nous faut dignement accueillir |
Celui dont le nom seul fait toujours tressaillir.
Le dirai-je ?... Je crains de voir arriver l'heure
Où son pied doit toucher cette sainte demeure.
Et c'est en ce jour même ?
PAULA.
Oui, c'est en ce beau jour
30 | Que le ciel a voulu nous marquer son amour. |
EUPHÉMIE.
L'heure ?
PAULA.
Je n'en sais rien,
ApercevantJulienne.
Mais voici Julienne.
Elle court : on dirait qu'elle va perdre haleine.
Que nous apporte-t-elle ?
SCÈNE II.
Les mêmes et Julienne.
JULIENNE, comme essoufflée.
Euphémie ! Eh ! Paula !
PAULA.
Qu'est-ce donc ?
JULIENNE.
Monseigneur !
EUPHÉMIE.
Il approche ?
JULIENNE.
Il est Là.
EUPHÉMIE.
Ô mon Dieu ! |
JULIENNE, à Euphémie.
Ne crains rien. Va, c'est la bonté même. |
Comme on nous l'avait dit, en le voyant, on l'aime ;
Et, loin de redouter l'approche de ses pas,
On irait volontiers se jeter dans ses bras.
EUPHÉMIE.
Ah ! puisqu'il est si bon, mon âme se rassure.
JULIENNE.
40 | Notre félicité ne serait pas bien pure, |
Si la crainte pouvait s'y mêler un moment.
PAULA.
Ce n'est pas tout : il faut encore un compliment.
Qu'en dis-tu, Julienne ? Et toi, chère Euphémie ?
JULIENNE.
Sans doute.
EUPHÉMIE.
C'est très juste.
PAULA, à Euphémie.
Eh ! bien, ma bonne amie,
45 | Sache que pour ce soin je m'en rapporte à toi. |
Mon choix est fait.
EUPHÉMIE, avec modestie.
Non, non.
JULIENNE.
Je le confirme.
EUPHÉMIE.
En quoi
Ai-je donc mérité cette marque d'estime ?
JULIENNE.
C'est le voeu de nos soeurs. D'une voix unanime
Elles t'ont désignée.
EUPHÉMIE.
Allons, je vous en crois ;
50 | Et puisse-je, à mon tour, justifier ce choix ! |
JULIENNE.
Mais que vas-tu nous dire ?
EUPHÉMIE.
Il faut bien que j'y pense.
PAULA.
Quand on parle du coeur, on parle d'abondance.
EUPHÉMIE.
Ô ciel, en ce moment daigne inspirer mon coeur !
JULIENNE.
Le temps presse, allons donc !
EUPHÉMIE.
M'y voici :
Monseigneur,
55 | D'où nous vient ce beau privilège |
De vous approcher de si près ?
Nous pouvons contempler vos traits
Dans l'asile qui nous protège.
C'est un effet de votre amour
60 | Qui jusqu'à nous daigne descendre. |
Soyez béni, Père si tendre,
Soyez béni dans ce saint jour !
On dit que notre divin Maître
Aimait bien les petits enfants :
65 | Cet ami de nos jeunes ans |
En vous nous le voyons renaître.
Ce lieu si cher à notre coeur
Allait célébrer une fête :
Mais pouvait-elle être complète
70 | Sans la présence du Pasteur ? |
Dans cette pieuse retraite
Au ciel nous adressions des voeux :
Vous pouviez faire des heureux
En y montrant votre houlette.
75 | Vous paraissez : et notre front |
De joie aussitôt se colore,
Ainsi qu'à l'aspect de l'aurore
Se dore la cime du mont.
Vous paraissez : et l'on se presse
80 | Pour avoir part à vos faveurs. |
Vous paraissez : et tous les coeurs
Nagent dans une sainte ivresse.
Ah ! Pour tant de bienfaits si doux,
Ô Père rempli de tendresse,
85 | Nos coeurs vous aimeront sans cesse, |
Heureux s'ils sont dignes de vous !
JULIENNE.
Comme c'est bien parler ! Ah ! Que rien ne t'arrête :
Tu seras, je le vois, notre digne interprète.
EUPHÉMIE.
Vous croyez ?
JULIENNE.
Euphémie, à ta voix, je sentais
90 | S'élever de mon coeur les voeux que tu formais. |
Va, notre bon Pasteur ne pourra que sourire
À ces beaux sentiments que sa présence inspire.
EUPHÉMIE.
Et puis, je lui dirai qu'il daigne nous bénir :
N'est-ce pas, chères soeurs ?
PAULA.
Tu ne peux mieux finir
95 | Qu'en implorant pour nous cette faveur nouvelle |
Que je vois découler de sa main paternelle.
JULIENNE.
Allons donc, sans tarder, au plus cher des Pasteurs !
Allons lui présenter l'hommage de nos coeurs !
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