******************************************************** DC.Title = LES MARIAGES DE CANADA DC.Author = LESAGE, Alain-René DC.Creator = FIEVRE, Paul DC.Publisher = FIEVRE, Paul DC.Subject = Comédie DC.Subject.Classification = 842 DC.Description = Edition du texte cité en titre DC.Publisher = FIEVRE, Paul DC.Contributor = DC.Date.Issued content = DC.Date.Created = DC.Date.Modified = Version du texte du 06/06/2020 à 17:31:02. DC.Coverage = Canada DC.Type = text DC.Format = text/txt DC.Identifier = http://www.theatre-classique.fr/pages/documents/LESAGE_MARIAGESDECANADA.xml DC.Source = http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5525234s DC.Source.cote = DC.Language scheme = UTF-8 content=fr DC.Rights = Théâtre Classique, (creative commons CC BY-NC-ND) *************************************************************** LES MARIAGES DE CANADA PIÈCE D'UN ACTE. Représentée à la Foire Saint Laurent en 1734. M. DCC. XXXVII. Avec Approbation et Privilège du Roi. Par Mr LE S***. À PARIS, Chez PIERRE GANDOUIN, Quai des Augustins, la deuxième Boutique à la descente du Pont-Neuf, à la Belle-Image. ACTEURS DAMIS, Amant de Lucile. CLITANDRE. LE CHEVALIER. MADAME BOURDON, Directrice. LUCILE, Amante de Damis. CLARISSE, Maîtresse du Chevalier. COLOMBINE. MEZZETIN, époux de Colombine. BONIFACE, Portier de Madame Bourdon. UN NOTAIRE. La Scène est à Québec. Le texte est issu de "Le Théâtre de la Foire, ou L'opéra comique (...), par Mrs Lesage et d'Orneval", TOME IX. pp. 275-297. LES MARIAGES DE CANADA. Le théâtre représente la Ville de Québec. On voit dans le fond un grand hôtel dont la mer bat les murs, et des maisons dans les ailes. SCÈNE PREMIÈRE. Damis, Mezzetin. MEZZETIN. AIR. [Voulez-vous savoir qui des deux ?]Malgré tous les périls divers.Que l'on peut courir dans les mers,Par une divine assistance De tout accident préservés Enfin, dans la Nouvelle France Nous voici tous deux arrivés. DAMIS. AIR. ( Du Cap de Bonne Espérance. )Tu sais bien ce qui m'amèneÀ Québec, cher Mezzetin ;De mon amoureuse peineJe viens y chercher la fin. Mais, hélas ! Sur ce rivage,Triste fruit de mon voyage,Je crains de trouver un sortPlus malheureux que la mort. MEZZETIN. Je suis votre valet. Il n'y a point de plus grand malheur que celui de mourir. DAMIS. Si tu étais dans la situation violente où je me vois... MEZZETIN. AIR 105. ( Nos plaisirs seront peu durables. )Devenez, Monsieur, plus tranquille. Dans ces lieux vous allez revoirAujourd'hui l'aimable Lucile ;Flattez-vous de ce doux espoir. DAMIS. Quand Lucile serait à Québec, qui m'assurera qu'on ne l'a point encore mariée. MEZZETIN. C'est ce que nous saurons bientôt. Adressons-nous à quelque domestique de cette grande maison, où sont logées les personnes que l'on envoyé de France en Canada. DAMIS. J'en vois un à la porte. MEZZETIN. Il faut lui parler. SCÈNE II. Damis, Mezzetin, Boniface. MEZZETIN, à Boniface. AIR 79. (Faites boire à triple mesure.)N'êtes-vous point par aventureDe cet hôtel un officier ?; À votre grassette encolureJe vous en crois le cuisinier. BONIFACE, sur le ton du dernier vers. Non je n'en suis que le portier.Mon nom est Boniface. DAMIS. N'est-ce pas chez vous que demeurent les personnes qui arrivent de Paris ? BONIFACE. Oui. AIR 106. ( Un jour dans un plein repos. )Toute fille de Paris,Ou laide ou jolie, Qu'on amène en ce pays,Pour la colonie,On la fait loger céans ;Et puis, sans perdre de temps,On vous la, Talera, lera,Lera tala, talera lala,On vous la marie. MEZZETIN. Au premier venu sans doute ? BONIFACE. Non pas, s'il vous plaît. C'est à celui que veut lui donner Madame Bourdon, la Directrice de cet hôtel. DAMIS. AIR. ( Amis, sans regretter Paris. )Si cette Madame BourdonFait d'heureux mariages, Je crois qu'elle fait pour un bonMille mauvais ménages. BONIFACE. Oh, que non ! Diable ! C'est une femme d'un grand discernement. AIR 107. [C'est à boire qu'il nous faut.]À la laide, à la gentilleElle trouve leur ballot :Qu'elle envisage une fille, Ho !La bonne Dame aussitôtSait le Drille, Drill, Drille, Sait le Drille qu'il lui faut. DAMIS. Elle est donc bien pénétrante cette Madame Bourdon , BONIFACE. Cela n'est pas concevable. AIR. [ Comme un coucou que l'amour presse. ]En regardant une Mignonne, Elle sait s'il faut lui donnerUn épouseur qui la bâtonneOu qui s'en laisse bâtonner. MEZZETIN. Quelle connaisseuse ! DAMIS. Mais Monsieur Boniface. AIR. [ Pour passer doucement la vie. ]Parmi ces filles malheureusesQue l'on envoie en Canada, On en peut voir de vertueuses. BONIFACE. J'en ai vu peu de celles-là. MEZZETIN. Il y en a pourtant. À telles enseignes que nous venons ici en réclamer une, et une fille de Paris encore. DAMIS. AIR. [ Ô reguingué. ]C'est une fille qui n'a pasMoins de sagesse que d'appas. BONIFACE. D'où vient qu'elle est dans ces climats ? MEZZETIN. La pauvre fille ! Son voyageD'une belle-mère est l'ouvrage, BONIFACE. Les méchantes femmes que les belles-mères ! Il y en a qui font capables de tout. Comment appelez-vous votre innocente parisienne ? DAMIS. Lucile. AIR. [ J'entends déjà le bruit des Armes. ]De cette dame infortunéeLe déplorable sort est tel,Que j'ai grand-peur que l'hyménée N'ait, dans ce redoutable Hôtel,Déjà lié sa destinéeAu sort d'une indigne mortel. BONIFACE. Et c'est apparemment ce que vous souhaitez de savoir. DAMIS. Oui, Monsieur Boniface. Je vous prie de vous en informer. AIR. [ Pour faire honneur à la noce. ]Tirez-moi d'inquiétude ;Que je vous doive mon repos : Vous savez que de tous les mauxLe plus grand est l'incertitude,Tirez-moi d'inquiétude.Que je vous doive mon repos. BONIFACE, froidement. Volontiers. MEZZETIN. Faites ce plaisir, de grâce, à Monsieur Damis. BONIFACE. Ouida, je ferai ce que je pourrai pour le contenter. DAMIS, lui présentant une bourse. Ne rejetez point ma prière. BONIFACE. Je ne rejette rien. AIR 38. [ Le vin a des charmes puissants. ]Monsieur, je trouve en vérité Vos manières trop engageantes :J'aurais grand tort de mon côtéDe n'en avoir pas d'obligeantes.Je vais tout à l'heure découvrir ce qu'est devenue votre Lucile ; et il y aura bien du malheur, si je n'y puis réussir. DAMIS. Vous me rendrez la vie. BONIFACE. AIR 19. ( Vive Michel Nostradamus. )Je vous en promets des nouvelles ;Comptez sur ce que je vous dis. J'en vais demander au commisQui tient registre de nos belles.Attendez un moment ici,De tout vous serez éclairci. [ Boniface s'en va. ] SCÈNE III. Damis, Mezzetin, DAMIS, déclamant. Dans quel état cruel Boniface me laisse ! Que je crains son retour ! MEZZETIN, déclamant à son exemple. Seigneur, point de faiblesse.II vous faut préparer à tout événement. AIR. ( Quand on a prononcé ce malheureux oui. )Je veux qu'en pareil cas un amant s'évertue,Boniface dit que Lucile est pourvue,Au lieu d'en concevoir une forte douleur, Il faut en philosophe apprendre ce malheur. SCÈNE IV. Damis, Mezzetin, Le Chevalier. LE CHEVALIER, chantant et dansant, Ton relon ton ton,Tontaine la fontaine ;Ton relon ton ton,Tontaine la tonton. DAMIS, à part. Ho, ho ! Quel homme est-ce que j'aperçois ? LE CHEVALIER, à part. Qui sont ces gens-ci ? Il me semble que je les connais. MEZZETIN. AIR. ( Attende-moi sous l'Orme. )Ah ! Que vois-je paraître !Quel est cet homme-là ;Je crois le reconnaître ;Oui, ma foi, le voilà.C'est ce fils de Libraire, Qui, quoique roturier,Prend d'un air MousquetaireLe nom de Chevalier. DAMIS. Justement, je me le remets. C'est un original. MEZZETIN. Qui n'est pas sans copie. LE CHEVALIER, après avoir envisagé Damis et son Valet. Je ne me trompe point. C'est Damis. C'est Mezzetin. Ils s'embrassent. MEZZETIN. AIR 108. [ Ô turlutaine ! ]Bonjour mon beau Capitaine !De vous revoir je suis ravi Si loin des bords de la Seine,Ô turlutaine !Le Chevalier Moreri,Turlutu tantaleri. LE CHEVALIER. Par quel hasard vous trouvez-vous a Québec ? Pour moi, si j'en ai fait le voyage, AIR. [ Belle Brune. ]C'est mon père, Bis.Qui, dans fa mauvaise humeur,Malgré moi, me l'a fait faire. MEZZETIN. Le bon père !Le bon père ! LE CHEVALIER. Oui ; mais je me suis bien vengé de sa tyrannie.... Il rit de toute sa force. DAMIS. Comment cela ? LE CHEVALIER. La veille de mon départ de Paris je me glissai la nuit dans fa bibliothèque, où je fis un désordre effroyable. AIR 109. ( Sans-dessus dessous. )Les plus célèbres écrivains, Bis. Ma foi, passèrent par mes mains. bis. MEZZETIN. Je vois bien de quelle manière,Sans-dessus-dessous,Sans devant derrière,Vous mîtes les volumes tous Sans devant derrièreSans-dessus dessous. LE CHEVALIER. Ho ! vous n'y êtes pas. J'ôtai de chaque tome vingt ou trente feuilles, sans respect pour aucun auteur ancien ou moderne, profane ou sacré. Je couvris le plancher de leurs dépouilles. DAMIS. Quelle vengeance ! MEZZETIN. Malepeste ! LE CHEVALIER. AIR. ( Des Trembleurs. )Sans façon je fis main-basseSur Denis d'Halicarnasse ,Sur Plutarque, sur le Tasse ; Je les mis tous en lambeaux. DAMIS. Qu'avez-vous fait ! quel ravage ! MEZZETIN. Ah ! Quel horrible carnage ! LE CHEVALIER. Je mutilai dans ma rageCent auteurs vieux et nouveaux. MEZZETIN. Ventrebleu ! LE CHEVALIER. AIR. ( J'ai fait souvent raisonner ma Musette.)Je déchirai Cléopâtre et Clélie,Je n'épargnai pas même le Sethos ;Et dans l'excès de ma juste furieDu grand Cyrus je troublai le repos. MEZZETIN. Quel dommage ! DAMIS. AIR. ( De la Besogne. )Ceux dont vous n'avez seulement Ôté que l'avertissementIls n'ont reçu, je vous assure,Qu'une très légère blessure. MEZZETIN. Non, ma foi ; ils en font quittes à bon marché. LE CHEVALIER. AIR. ( Le savant Diogenes. )Orateurs, et Poètes,Voyageurs, Interprètes, Savants Commentateurs,Tous les Dictionnaires,Et même les GrammairesOnt senti mes fureurs. MEZZETIN. Quel enragé ! LE CHEVALIER. AIR. ( Je ne suis né ni Roi ni Prince. )Ravi d'avoir dans ma colère Joué ce beau tour à mon père,Avant l'Aurore je partis.Ainsi mes mains autoricidesEn une nuit de son logisFirent un Hôtel d'Invalides. Il se remet à rire.Je ne puis m'empêcher de rire quand je songe aux grimaces que mon père a dû faire après mon départ, en considérant les blessés. MEZZETIN. Et en calculant ce qu'il lui en coûtera pour leur guérison. DAMIS. Mais, Chevalier, pourquoi votre père vous-a-t-il éloigné de lui si désagréablement ? LE CHEVALIER. AIR 110. ( Quitte ta houlette. )J'aimais une filleFort sage et fort gentille,J'aimais une filleDu Faubourg Saint-Germain,J'étais fidèle À cette Belle,J'allais chez elleSoir et matin :Je voulais l'épouser enfin. DAMIS. AIR 41. ( Que je regrette mon amant. )Mais cette personne avait donc Une humeur bien réjouissante ? LE CHEVALIER. Et de l'esprit comme un DémonAvec cette folle amusanteUn jour me semblait un moment. MEZZETIN. C'était donc un ravissement. LE CHEVALIER. Je me proposais d'en faire ma femme ; mais... DAMIS. Mais le Papa n'y voulut pas consentir apparemment. LE CHEVALIER. Il fit plus. Le cruel me défendit de fréquenter Clarice. C'est le nom de ma Princesse. MEZZETIN. Vous ne laissâtes pas de continuer à la voir malgré sa défense. LE CHEVALIER. Belle demande ! DAMIS. Votre père perdit patience. LE CHEVALIER. Vous y voilà. Et pour me séparer de Clarice, il m'a brusquement envoyé dans ce pays-ci. MEZZETIN. Il y a des pères bien malins. LE CHEVALIER. Tout ce que je crains, c'est que Clarice est une orpheline sans bien et sans appui... AIR. ( Ahi, ahi, ahi ! Jeannette. }Mon père la gâteraDans l'esprit de la Police.Il est bien homme à oela ;Car je connais sa malice. MEZZETIN. Ahi, ahi, ahi ! Clarice, Clarice, ahi, ahi, ahi ! LE CHEVALIER. À cela près, je me console d'être hors de Paris. Je suis bien aise de voir le monde. Les voyages font bien les gens. MEZZETIN. Et particulièrement les Parisiens. DAMIS. Chevalier, je vous conseille de faire tous vos efforts pour oublier Clarice. LE CHEVALIER. C'est mon dessein. MEZZETIN. Vous en viendrez à bout. LE CHEVALIER. Je n'en désespère pas. MEZZETIN. Je vous en réponds. AIR 9. (Voyelles Modernes.)Les enfants de famillesSont envoyés ici i, i, i,Pour oublier les filles.L'eau de Mississipi, i, i, i, En fait perdre la mémoire :C'est un fleuve d'Oubli. LE CHEVALIER. Biribi, ...J'en veux boire !J'en veux boire ! Pour bannir plus facilement Clarice de mon souvenir, je me suis déterminée à prendre pour femme une fille que Madame Bourdon me destine. DAMIS. C'est fort bien fait. LE CHEVALIER. Je ne l'ai pas vue ; mais c'est un joli sujet, à ce que m'a dit la Directrice. AIR 111. ( Changement pique l'appétit. )C'est une fille appétissante,Qui danse, qui saute et qui chanteD'une manière qui ravit. MEZZETIN. Changement pique l'appétit. LE CHEVALIER. Jusqu'au revoir, Messieurs. AIR. ( Quand ìe péril est agréable. )Je vais prier la Directrice De vouloir hâter cet hymen.Je crois qu'un tendron de sa mainVaudra bien ma Clarice. DAMIS. Je n'en doute nullement. LE CHEVALIER. Je me sens par avance de l'amour pour ce tendron. Il s'en va en dansant et en chantant. Fin de l'AIR 87. ( Turlurette, turluron.)Pour ce Tendron,Turelurette, Pour ce Tendron,Tureluron. SCÈNE V. Damis, Mezzetin. DAMIS. AIR 34. ( Baise-moi donc me disait Biaise. )Si nous jugeons sur l'étiquette,Je crois Bis.Clarice une coquette, Qui devrait être dans ces lieux. MEZZETIN. Oui vraiment, ce beau domicileÀ Clarice conviendrait mieuxMille fois qu'à votre Lucile. SCÈNE VI. Damis, Mezzetin, Boniface. DAMIS. Ah ! voici Monsieur Boniface. AIR. (Adieu paniers. Vendanges sont faites. )Hé bien, dites-nous si vous êtes Du sort de Lucile éclairci. BONIFACE. Vous arrivez trop tard ici :Adieu paniers, vendanges sont faites. MEZZETIN. Ouf ! DAMIS. Ô Ciel ! BONIFACE. AIR. ( L'autre nuit j'aperçus en songe. }Voici ce que je viens d'apprendre :Lucile, m'a dit le Commis, Est venue ici de ParisAvec un appellé Clitandre.Ils disent qu'ils sont sous les lois.Du Dieu d'hymen depuis six mois. DAMIS, étonné. Mezzetin ! MEZZETIN, étonné. Monsieur ! DAMIS. Lucile mariée depuis six mois ! Il n'y a pas d'apparence à cela. MEZZETIN. Avec un Homme que nous ne connaissons point ! Il y a de l'impossibilité là dedans. DAMIS. AIR 17. (Vaudeville du Nouveau-Monde. )Cette Lucile n'est donc pas Celle dont nous suivons les pas. MEZZETIN. Ce ne saurait être la nôtre. DAMIS. Ma Lucile a trop de candeur,Pour avoir trompé mon ardeur. MEZZETIN. Encore une fois c'est une autre. DAMIS. J'en suis persuadé. Cependant je serais curieux de voir cette Lucile qui se dit femme de Clitandre. BONIFACE. Je l'ai vue un moment. Le Commis me l'a montrée comme elle passait avec son mari. DAMIS. AIR. (Tes beaux yeux, ma Nicole.)Puisque vous l'avez vue,Dépeignez-nous-la donc. BONIFACE. Elle est grande, menue,Étroite comme un jonc :Elle est toute charmante, Elle a les traits mignons,Une gorge naissante,Deux yeux des plus fripons. MEZZETIN, à Damis. Monsieur, voilà une Lucile qui ressemble diablement à la vôtre. DAMIS. D'accord ; mais je £uk sûr que ce n'est pas elle. MEZZETIN. Je le crois comme vous ; mais... AIR. ( Le Cabaret est mon réduit. )Pour un moment dépouillons-nousDe tout préjugé l'un et l'autre. Peut-être, que savez-vous,Cette Lucile est la nôtre.Cette Lucile est...Cette Lucile est...Cette Lucile est la nôtre. DAMIS. Je gagerais bien que non. Monsieur Boniface, procurez-moi le plaisir de voir un instant cette Dame. BONIFACE. Ne vous éloignez pas d'ici. Je contenterai votre curiosité, sitôt que j'en trouverai l'occasion. Damis et Mezzetin s'en vont. SCÈNE VII. BONIFACE, seul. Est-ce qu'il y aurait effectivement ici une autre Lucile que celle qui se dit femme de Clitandre. Je ne le crois pas. AIR 112. ( Pendant que nous sommes. )Il n'en est aucuneDans cette Maison ;Ou s'il s'en trouve quelqu'une,Elle a donc changé de nom.Mais voici celle que j'ai vue. Courons en avertir Damis. SCÈNE VIII. Lucile, Clitandre. CLITANDRE. AIR. (On n'aime point dans nos Forêts.)En nous disant unis tous deux. Par les liens du mariage,Nous évitons le sort affreux,Qui fait l'infaillible partageDes Français par force amenésDans ces climats infortunés. LUCILE. AIR 113 (L'autre jour dessous un Ormeau. )Nous avons tous deux le bonheur,Par cette fable,D'avoir paré la rigueurL'éternelle douleur,Le désespoir, l'horreur D'un hymen effroyable ;D'accord : Mais je suis, hélas !Dans un autre embarras ! CLITANDRE. Dans quel embarras ? LUCILE d'un air embarrassé. Je crains... CLITANDRE. Hé quoi ? AIR. ( Ton limeur est cathereine. )Que votre bouche s'explique. LUCILE. Vous passant pour mon époux, Il faudra, par politique,Que je demeure avec vous.J'en frémis, lorsque j'y pense. CLITANDRE. Votre crainte, en vérité,Lucile, sait une offense À ma générosité.Je suis honnête-homme. Ne craignez pas que j'abuse jamais de la situation fâcheuse où vous êtes réduite. AIR. ( Le Démon malicieux et fin. )Vous avez de quoi tout enflammer,On ne peut vous voir sans vous aimer ;Mais soyez cependant sans alarmes.Malgré les dons que vous ont fait les cieux, Mon respect sans cesse sur vos charmesS'efforcera de me fermer les yeux. LUCILE. AIR 13. ( Ho, que si ! Ho, que nenni ! )En vain vous parlez ainsi,De troubler mon repos, Clitandre,Vous ne pourrez vous défendre. CLITANDRE. Ho, que fi ! LUCILE. C'est promettre, Téméraire,Plus que vous ne sauriez faire. CLITANDRE. Ho, que nenni ! AIR. ( Quand je tiens de ce jus d'octobre. )D'une amitié pure et parfaite Goûtant avec vous la douceur,Je vivrai dans notre retraiteComme un bon Frère avec sa soeur. LUCILE. AIR 24. ( Je le crois bien, je n'en crois rien. )Près d'une fille de mon âgeQu'un Garçon soit quelque-temps sage, Je le crois bien ;Mais qu'il puisse avoir la constanceDe garder toujours le silence,Je n'en crois rien. SCÈNE IX. Lucile, Clitandre, Damis, Mezzetin, Boniface. BONIFACE, montrant Lucile à Damis. Tenez, regardez. Est-ce-là vous Lucile ? DAMIS. AIR 18. ( Menuet de Grandval. )Oui, juste Ciel ! C'est elle-même ! LUCILE, apercevant Damis. Ah ! quel objet s'offre à mes yeux ! Damis ! Ma surprise est-extrême !Damis, vous êtes dans ces lieux ! DAMIS. AIR. ( Je me ris de qui fait le brave. )Ah ! Lucile, Ingrate, Traîtresse,Vous avez donc trompé mes feux !Quand vous écoutiez ma tendresse, Quoi ? J'avais un rival heureux !Ah ! Lucile, Ingrate, Traîtresse,Vous avez.donc trompé mes feux ! LUCILE. AIR. ( Pourquoi n'avoir pas le coeur tendre ? )Vous me condamnez sans m'entendre. DAMIS. L'Hymen vous tient sous sa loi Depuis six mois avec Clitandre. LUCILE. Non,non, non, je vous garde ma foi. DAMIS. Serait-il possible ? LUCILE. Clitandre n'est point mon époux,Damis, détrompez-vous. Bis. DAMIS. Comment ? Je serais dans l'erreur ! Ô Grands Dieux, quel bonheur ! Bis. LUCILE. Je suis venue ici de Paris avec Clitandre qui comme moi a été injustement envoyé en Canada. Nous nous sommes fait une mutuelle confidence de nos affaires ; et nous avons jugé à propos de nous dire mariés ensemble. Sans ce mensonge favorable, AIR. ( Qu'on apporte bouteille. )Pour vous j'étais perdue ;Et Madame BourdonPeut-être m'eût déjà pourvueDe quelque époux de sa façon. Mais le Ciel m'a du moins sauvée de ce malheur. DAMIS. Jugez de ma joie par la vôtre. AIR. ( Vous brillez seule en ces retraites. )Je suis venu dans ces retraitesPlus que jamais épris de vos appas.Damis ne se plaît qu'où vous êtes ;Et partout il suivra vos pas.Sitôt que j'ai su l'injustice de vos parents, à votre égard, j'ai vendu à Paris tous mes effets, pour venir vous épouser en Canada, et passer mes jours avec vous dans une agréable habitation que je suis en état d'acheter. AIR 74. ( Viens, charmante Anette.}C'est dans cet asile, Ma chère Lucile,Que mille plaisirsCombleront vos désirs. LUCILE. Que cette promesseFlatte ma tendresse ! À ce lieu charmantRendons-nous promptement. CLITANDRE. AIR. ( Ma raison s'en va beau train. )De votre époux il faut doncQue j'abandonne le nom ? DAMIS, à Clitandre. Oui, je suis jaloux De ce nom si doux ;Cédez-le-moi, Clitandre. CLITANDRE. Damis, il n'appartient qu'à vous :C'est à vous de le prendre,Lonla , C'est à vous de le prendre.Voilà Lucile hors d'affaire : mais je ne le fuis pas encore, moi. Quand Madame Bourdon saura que je ne suis point marié, elle voudra que je le sois. Heureusement, je connais le Secrétaire du Gouverneur. Je vais le trouver. Je crois qu'il voudra bien entrer dans mes intérêts. LUCILE. N'en doutez pas ; et il aura du moins le crédit de vous préserver du malheur de recevoir une Belle des mains de la Directrice. DAMIS. Oh, qu'oui ! CLITANDRE. AIR 114. ( Vaudeville des Fétes du Cours. )J'aime mieux sur mon âmeRester toujours garçon,Que d'avoir une femmeMarquée à son poinçon. Si jamais je faisais un pareil mariageJ'aurais peu d'agrément,Vraiment ;On n'en a même pas,Hélas ! Dans le meilleur ménage, Il s'en va. SCÈNE X. Lucile, Damis, Mezzetin. LUCILE. AIR. { Quand on a prononcé ce malheureux oui. )Pour nous, qui souhaitons que l'hymen nous unisse,Allons sans différer chercher la Directrice. DAMIS. Contons-lui nos amours , et la pressons tous deuxD'achever dès ce jour le bonheur de nos feux. Lucile et Damis sortent. SCÈNE XI. MEZZETIN seul, rêvant. Les voilà qui vont se marier. Le Ciel en soit loué ! Je meurs d'envie d'en faire autant... Mais doucement, Monsieur Mezzetin, vous oubliez que vous avez une femme à Paris. AIR 57. ( Perrette étant dessus l'herbette. )Ah ! morbleu, cela me chagrine !Je suis époux de Colombine ;Mais personne ici ne le sait.D'ailleurs, d'un Garçon j'ai la mine,Sur ma foi, risquons le paquet. Pourquoi non ? Je ne reverrai jamais mon épouse, trop de mers nous séparent. Rien ne doit m'arrêter. Au reste, AIR (Je ne suis né ni Roi ni Prince.)Je crois que cette bonne Dame.Mérite un Mari polygame.Ma foi, de notre éloignementJe jurerais que la volageDe son coté dans ce moment Fait à peu près le même usage. Il sort. Le fond du théâtre s'ouvre, et représente une Salle en forme de Temple. On voit comme dans une Chaire de Régent un Notaire bizarrement vêtu, qui écrit sur un Regître, et Madame Bourdon habillée d'une maniéré modeste. SCÈNE XII. Madame Bourdon, Lucile, Damis , Le Notaire. MADAME BOURDON, à Damis. AIR. ( Ma pinte et ma mie ô gué. )Pour Lucile, enfin, Monsieur,L'amour vous enflamme. DAMIS. Pour elle une vive ardeurDévore mon âme. Daignez faire mon bonheur. MADAME BOURDON. Vous voulez donc de bon coeurLa prendre pour femme,Ô gué,La prendre pour femme ? DAMIS. AIR. ( Allons gay. )C'est ma plus chère envíe. MADAME BOURDON, à Damis. Votre main. DAMIS, la donnant. La voilà. MADAME BOURDON, à Lucile. Et la vôtre, ma mie. LUCILE, la donnant. La voici. MADAME BOURDON la mettant dans celle de Damis. Touchez-là. Allons gay,D'un air gay, etc. AIR 115. ( Ah ! que j'étais insensée. )Allez, votre affaire est faite ;Enfants, vous pouvez sortirDe cet hôtel, et partir Tous deux pour votre retraite.Vous êtes, tendres époux,Unis des noeuds les plus doux. DAMIS. AIR. ( Bergères de Maintenon. )Madame, adieu. Je vais avec LucileDans un séjour agréable et tranquille. MADAME BOURDON. Mais aimez-vous toujours dans votre asile. AIR. ( Ce sont les amours qui font les beaux jours. )D'un amour sincèreSans cesse enflammés,Soyez animésDu soin de vous plaire. Ce sont les amoursQui font les beaux jours. Damis et Lucile saluent Madame Bourdon, et se retirent. SCÈNE XIII. Madame Bourdon, Mezzetin. MADAME BOURDON. AIR. ( Dondaine, dondaine. )Mais, que me veut dire ce gros garçon ? Bis. MEZZETIN, saluant Madame Bourdon. Salut à Madame Bourdon,Dondaine, dondaine. MADAME BOURDON. Apprends-moi sans façonCe qui t'amène. MEZZETIN. AIR 12. ( Voyelles anciennes. )Pendant que vous êtes en trainD'aparier, ma bonne Dame,Je veux aussi de votre main Avoir, s'il vous plaît, une femme.Faites-moi cette grêce Ilà ;Je me sens une forte envi, i i i i i i eDe demeurer en Canada,Pour renforcer la Coloni i i i i i i e. MADAME BOURDON. Ouidà, mon ami, il faut te satisfaire, puisque tu es de si bonne volonté. Mais quel talent as-tu pour subsister ici ; car tu n'es pas riche apparemment ? MEZZETIN. AIR. ( Je suis la fleur des Garçons du Village.)J'ai pour tout bien deux bons bras en partage ;Je bêcherai, je piocherai :Pour faire aller rondement mon ménageJour et nuit je travaillerai. MADAME BOURDON. Cela suffira. AIR. ( Je n'en veux pas davantage. )Avoir le coeur à l'ouvrage, C'est tout ce qu'il faut ici. MEZZETIN. J'entends bien le Jardinage,Et le Labourage aussi.Pour vivre en ce lieu sauvageFaut-il que j'en sache plus long ? MADAME BOURDON. Hé, non, non, non,Il n'en faut pas davantage.Comment vous appelez-vous ? MEZZETIN. Mezzetin. MADAME BOURDON, au Notaire. Écrivez ce nom, Monsieur Griffon. MEZZETIN, à Madame Bourdon. AIR. (Je ne suis né ni Roi ni Prince.)Oui ; mais donnez-moi, je vous prie,Pour ragoûter ma SeigneurieQuelque minois qui soit mignons Une fille de riche taille ;En un mot, Madame Bourdon,[Note : Canaille : Vile populace. [L]]Distinguez-moi de la canaille. MADAME BOURDON. Cela est juste. Tu me parais mériter cette distinction. AIR 85. ( Commer', j'ai un bon Mari. )Je vais à mon magasin Bis.Moi-même chercher du fin, Une fille de mise :Je vais ramener enfin,De bonne marchandise. Elle r'etttre. SCÈNE XIV. MEZZETIN, seul. AIR. ( Amis, sans regretter Paris. )Que cette Madame BourdonÀ l'humeur obligeante ! De sa main j'attends un trognonD'une beauté charmante.[Note : Hoc : Fig. Ce qui est assuré à quelqu'un. [L]]Cela m'est hoc. AIR 51. ( Allons voir, trois fois. )Je vais voir, je vais voir, je vais voirDans un moment ma future ;Je vais voir, je vais voir, je vais voir Quell'mine elle peut avoir.Ha! La voici. Fin de l'AIR. (J'entends le moulin taqueter. )Ah ! Déja je sens, tique, tique , taque, Oui, je sens mon coeur taqueter. SCENE XV. Mezzetin, Madame Bourdon, Colombine voilée. MADAME BOURDON. AIR 6. ( Vous avez bien de la bonté. )Tiens, je t'amène, mon PouletUne aimable Poulette. MEZZETIN. De prime abord, son air me plaît.La Drôlesse est bien faite. MADAME BOURDON. Tu serais par trop dégoûté.Si tu ne trouvais cette filleToute gentille. MEZZETIN. Madame, en vérité,Vous avez bien de la bonté. MADAME BOURDON. Je vous crois tous deux bien assortis. MEZZETIN. Ah ! Pour cela oui. AIR 116. ( Un certain je ne sais qu'est-ce. }Par ía jarni ! plus je la vois,Plus elle m'intéresse !Je frémis déjà de tendresse ; À sa vue, en dépit de moi,Je sens un certain je ne sais qu'est-ce,Je sens un certain je ne sais quoi. MADAME BOURDON. Çà, donnez-vous 1a main... Découvrez-vous , Mademoiselle, vous êtes mariée. Colombine ôte son voile. MEZZETIN, reconnaissant sa femme. Hoï-mé ! MADAME BOURDON. AIR 17. ( Diablezot. )Vois-tu ce petit air mutin. MEZZETIN. Ha ! ventrebleu ; c'est Colombine ! MADAME BOURDON. Mais qu'as-tu donc, cher Mezzetin ? Tu me parais faire la mine.Rends grâce au Ciel de ton destin.Cette fille a de quoi te plaire,Il vient de t'échoir un bon lot.Te voilà bien en Ménagère. MEZZETIN. Diablezot ! MADAME BOURDON. Mais qu'avez-vous donc tous deux ? Vous changez, de visage l'un et l'autre ! COLOMBINE. AIR 18. ( Menuet de Grandval. )Ah ! C'est donc toi, vilain ivrogne ? MADAME BOURDON. Le compliment me paraît doux. MEZZETIN. C'est vous, Madame la Carogne ? MADAME BOURDON. Ce font sans doute deux époux, COLOMBINE. AIR. ( Des Fraises. )Qui croyait en CanadaTrouver ce misérable ? MEZZETIN, la menaçant. Sans Madame que voilà... COLOMBINE. Je voudrais ce coquin-làAu Diable, au Diable, au Diable. MEZZETIN. Je le crois. Je juge de vous par moi-même. MADAME BOURDON. AIR. ( Quand Iris prend plaisir à boire. )Laissez-là ces paroles vives,Ces fureurs et ces invectives ;Parlez-vous d'un air plus poli. À Colombine.Même dessein vous tenait en cervelle,Vous vouliez un nouveau mari, Et le drôle voulait aussiPrendre aujourd'hui Bis.Femme nouvelle.Vous n'avez rien à vous reprocher. Croyez-moi, mes amis, faites de nécessité vertu. Réconciliez-vous de bonne foi. MEZZETIN. J'y consens. MADAME BOURDON, Colombine. Et vous ? COLOMBINE, d'un airfroid. Je ne m'y oppose pas ; mais... MEZZETIN, d'un air brusque. Quoi, mais ?... Il n'y a rien encore de fait. COLOMBINE, à Madame Bourdon. AIR 117. (Hé, mariez-vous donc ?)Vous voulez que je me remetteAvec cette tête malfaite, Pleine de souris et de rats ? MEZZETIN. Ne vous remettez pas. COLOMBINE. Malgré pourtant ma répugnance, Je veux enfin, par complaisance,Me raccommoder tout de bon. MEZZETIN. Raccommodons-nous donc ? MADAME BOURDON. Embrassez-vous tous deux sans rancune. MEZZETIN. Soit. Je ne veux plus me ressouvenus du passé. COLOMBINE. Ni moi non plus. MEZZETIN, à Colombine. (J'entends déja le bruit des armes.)Faisons la paix, ma Colombine. COLOMBINE. Tu viens d'apaiser mon courroux. MEZZETIN. Tu r'allume mes feux, Coquine. COLOMBINE. Je reviens à toi, cher époux ;Puisque la Fortune s'obstine À nous rejoindre malgré nous. SCÈNE XVI. Madame Bourdon, Mezzetin, Colombine, Le Chevalier. LE CHEVALIER. AIR. (Pierre Bagnolet. )Vous m'avez promis une femme,Sans délai, livrez-la-moi donc.Vous m'avez assuré, Madame,Que c'est un objet tout mignon,, Un beau tendron,Un blanc chignon.Vous m'avez promis une femme,Sans délai livrez-la-moi donc. MADAME BOURDON. AIR 53. ( Je suis un Précepteur d'amour. )À servir votre empressement, Chevalier, je suis toute prête ;Vous allez voir, dans un momentL'objet dont je vous ai fait fête.Attendez ici. Je suis à vous dans un instant. Elle rentre. SCÈNE XVII. Le Chevalier, Mezzetin, Colombine. MEZZETIN. AIR. (Talaletrire.)Elle va remplir votre attente ;C'est sur quoi vous devez compter. LE CHEVALIER. D'avoir une épouse charmante.Je crois que je puis me flatter. MEZZETIN. En la voyant vous allez dire :Talaleri Talaleri Talalerire. LE CHEVALIER. J'ai un pressentiment que je vais voir une belle personne. MEZZETIN. J'en suis persuadé. Oh, MadameBourdon sert bien les jolis Hommes. Lui montrant Colombine... Par exemple... AIR 97. (J'ai bien la plus sobre femme.)Cette belle est mon partage. LE CHEVALIER. Tu dois en être content.Oui, ventrebleu ! Ce visageMe paraît tout ragoûtant.Avec femme si jolieUn garçon de ton humeur Va faire à la Colonie,J'en suis sûr, beaucoup d'honneur. SCÈNE XVIII. Le Chevalier, Mezzetin, Colombine, Madame Bourdon, Clarice voilée. MEZZETIN. Vous ferez aussi bien partagé que moi. LE CHEVALIER. Je le souhaite. MEZZETIN, lui montrant Clarice. Je vous en réponds. Tenez, regardez. AIR. (Ha, vous avez bon aire ! )Voyez cette Pouponne. LE CHEVALIER. La gentille personne !Tudieu ! qu'elle est mignonne ! Quelle grâce elle a ! À ClaricePlus on vous considère,Plus vous plaisez, ma Chère.Ha ! vous avez bon aire ! CLARICE. Vous m'aimez déjà ! LE CHEVALIER. AIR. ( Ma belle Diguedon. )Vous avez un port de Reine,Belle Diguedi, diguedon dondaine.Je rends grâce à Madame Bourdon,Ma belle Diguedi, ma belle Diguedon,Du Tendron qu'elle m'améne, Belle Diguedi, diguedon , dondaine. MADAME BOURDON. AIR. ( Je ne vous ai vu qu'un seul petit moment. )Vous applaudissez, Chevalier, à mon choixVos yeux sont satisfaits, je le vois. LE CHEVALIER, considérant Clarice. Quelle vive allure !L'aimable figure ! Parbleu, je m'enflamme à la voir seulement,Et je me sens tout je ne sais comment. MADAME BOURDON. AIR ( Le Cabaret est mon réduit. )Déjà vous en êtes épris ? LE CHEVALIER. Oui, déjà je lui rends les armes. MADAME BOURDON. Vraiment, ce sera bien pis, Quand vous verrez tous ses charmes,Quand vous verrez tous Trois fois. Ses charmes. LE CHEVALIER. Vous irritez l'envie que j'ai de les voir. MADAME BOURDON. e vais vous contenter. Elle prend les mains de Clarice et du Chevalier, en disant à la Dame : AIR. ( La mirtamplain. )Pour époux ce jouvenceauÀ vous se présente ; Je vous joins d'un noeud si beau. CLARICE, ôtant son voile. La mirtanplain, lantirelarigot.J'en suis bien contente. LE CHEVALIER. AIR. ( N'y a pas d'mal à ça. )Ma chère Clarice,Hé quoi, vous voilà. Ciel ! Quelle injustice !Vous en Canada ! MEZZETIN. N'y a pas d'mal à ça,N'y a pas d'mal à ça, LE CHEVALIER. AIR 76. ( Ha, qui vous a, qui vous ai qui vous a. )Vous Clarice, dans ces lieux ! Hélas ! ce triste voyageDe mon Père furieuxNe serait-il point l'ouvrage ?Ha ! Qui vous a , qui vous a, qui vous a,Qui vous a donc fait cet outrage ? CLARICE. Oui, c'est le Papa Moreri, dont vous n'avez pas moins que moi sujet de vous plaindre. AIR ( Tu croyais en aimant Colette. )Mais le Dieu puissant de Cithère,L'appui des amants malheureux,Pour nous venger de votre pèreNous a rejoints ici tous deux. LE CHEVALIER. Mon Père est assez puni. AIR ( Je vous avais cru belle. )Pardonnez-lui, Clarice, Son injuste rigueur.Perdons le souvenir de sa malice,Puisqu'elle fait enfin notre bonheur.Ne nous occupons ici que de notre tendresse. CLARICE. Ne songeons qu'à nous aimer. AIR. ( Ha ! Phylis, je vous aimerai tant. )C'est un emploi fort amusant, Cher époux, je vous aimerai tant ! LE CHEVALIER. Et moi, je vous paierai comptant :Je vous vois, je vous ai, je vous aimerai tant, ENSEMBLE. Cher époux, je vous vois, je vous aime,Clarice, je vous vois, je vous aime, Ah ! Je vous ai, je vous aimerai tant! MADAME BOURDON. Ho-çà, mes amis, apprenez votre destination. Il vous est ordonné de vous établir sur les bords du fleuve Saint-Laurent avec ceux qui ont été mariés dans cette maison depuis trois jours. Partez tous ensemble. Vous trouverez près de rivage le vaisseau qui doit vous porter au Canton où vous ferez votre demeure. AIR. ( Tout le long de la rivière. )Vite qu'on s'assemble.Adieu, mes enfants ;Allez tous ensembleJoyeux et contents Tout le long de la Rivière,Laire,Lonlanla,Tout le long de la Rivière,Ah ! qu'il fait bon là i SCÈNE XIX ET DERNIÈRE. Mezzetin, Colombine, Le Chevalier, Clarice, Troupe d'hommes et de femmes mariés. On danse, et la danse est coupée par ces deux couplets. MEZZETIN. AIR 151. ( De Monsieur Gillier. )Éloignons-nous gaîment du port ;S'affliger est une faiblesse :Mes amis, allons, sans tristesseOù nous appelle notre sort.Par toute la terre habitable, Lorsque l'on a l'esprit joyeux,On est toujours moins misérable,Si l'on ne saurait être heureux. COLOMBINE. AIR 152. (De Monsieur Gillier.)N'appréhendons pas des HuronsLes farouches visages : Ou nous les apprivoiserons,Par nos plus doux usages ;Ou plus heureux, nous deviendronsPeut-être aussi Sauvages. On reprend la danse, et l'on chante le Vaudeville. VAUDEVILLE. AIR 153. De Monsieur Gillier. AIR 153. De Monsieur Gillier. MEZZETIN. Dans un désert, où la Nature Ne fournirait pour nourritureQue de l'eau claire et du pain,Un amant avec sa maîtresseOublierait le genre humain :Contentement passe richesse. II. COUPLET. COLOMBINE. Nous aurons dans notre chaumièreUne liberté toute entière ;Dans nos bois le long du jour.Ne respirant que la tendresse,Nous pourrons faire l'amour : Contentement passe richesse. III. COUPLET. UN ÉPOUX. Là, soutenant avec constanceUne supportable indigence,Suivis des Ris et des Jeux,Nous nous divertirons sans cesse ; Est-il des jours plus heureux ?Contentement passe richesse. IV. COUPLET. UN AUTRE ÉPOUX. Dans une honorable famille,J'ai vu marier une filleÀ certain riche Barbon. L'épouse eût péri de tristesse iSans le secours d'un Gascon :Contentement passe richesse. V. COUPLET. UNE FEMME. Certaine fille, dans l'attenteD'hériter, vivait chez sa tante ; La Tante était un dragon.La Nièce a de cette diablesseAbandonné la Maison :Contentement passe richesse, VI. COUPLET. Aux spectateurs. MEZZETIN. L'Auteur, Messieurs, voudrait vous plaire Sensible à la gloire, il préfèreVotre estime à votre argent.Pour lui quel sujet d'allégresse,Si le Public sort content!Contentement passe richesse. ==================================================