******************************************************** DC.Title = UN AMOUR PARISIEN, MONOLOGUE DC.Author = BONHOMME, Paul DC.Creator = FIEVRE, Paul DC.Publisher = FIEVRE, Paul DC.Subject = Monologue DC.Subject.Classification = 842 DC.Description = Edition du texte cité en titre DC.Publisher = FIEVRE, Paul DC.Contributor = DC.Date.Issued content = DC.Date.Created = DC.Date.Modified = Version du texte du 31/01/2023 à 15:51:07. DC.Coverage = France DC.Type = text DC.Format = text/txt DC.Identifier = http://www.theatre-classique.fr/pages/documents/BONHOMME_AMOURPARISIEN.xml DC.Source = https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5564952x DC.Source.cote = BnF LLA YE-38850 DC.Language scheme = UTF-8 content=fr DC.Rights = Théâtre Classique, (creative commons CC BY-NC-ND) *************************************************************** UN AMOUR PARISIEN MONOLOGUE PRIX : UN FRANC 1880. Pontoise. - Imp. de Ain. Paris. PERSONNAGES. LE NARRATEUR. UN AMOUR PARISIEN I. ***************** Erreur dans l'interprétation du texte (ligne 372, programme : edition_txt_TOUT.php) J'avais beaucoup aimé. l'avais été volage, Comme on l'est, quand on n'a que vingt ans; mais mon coeur M'avait dit qu'il fallait mettre un frein à sa rage, Qu'il fallait, pour avoir le fruit, garder la fleur, Et moi, je résolus d'écouter son langage. Je devins amoureux : aimant d'un fol amour Une blonde, aux regards tout injectés de flamme ; Bien belle, en vérité. - Je l'avais vue un jour, Au théâtre ; en sortant, je suivis cette femme Épiant le moment de commencer ma cour... Les fronces de satin dont se chargeait sa traîne, Autour d'elle exhalaient des parfums provocants ; J'en étais enivré, comme l'est la phalène Qui papillonne autour d'une fleur à piquants, Et qui voudrait humer le suc dont elle est pleine. II. ***************** Erreur dans l'interprétation du texte (ligne 372, programme : edition_txt_TOUT.php) Le ciel morne voilait son grand manteau d'azur ; Sur le trottoir glissant tombaient de larges gouttes. - Cette femme, de mon côté, suivait le mur ; Et les filles erraient et se dispersaient toutes, S'abritant de leurs mains et cherchant un lieu sûr. Je la regardais fuir. Elle allait par la rue, Étalant à mes yeux charmés son pied mignon, Haut cambré, séduisant, d'où sa tige charnue S'élançait insolente au travers d'un jupon, Qu'elle tenait avec une grâce ingénue. Cette stance peut être supprimée à l'audition. Je me sentais bondir comme un fauve en chaleur ; Je rugissais avec une rage lascive ; Et ce rut, qui montait plein de force et d'aigreur, Sur mes lèvres en feu, desséchant ma salive, Éveillait mes désirs cyniques de viveur. III. ***************** Erreur dans l'interprétation du texte (ligne 372, programme : edition_txt_TOUT.php) Le hasard me servit : l'ondée étant trop forte, Elle entra sous un porche ouvert, - pour s'abriter, - Et je me réjouis, pensant que de la sorte Sans qu'on me remarquât je pourrais l'arrêter, Et d'un bond je gagnai le seuil de cette porte. Et là je l'admirai. - Sur son front lisse et pur De petits cheveux blonds couraient en mèches folles, Pareils à des vapeurs rayant un ciel d'azur. - - Fiévreux, je tressaillais, sans force, sans paroles ; Avide comme on l'est en voyant un fruit mûr. Mon regard indiscret plongeait dans son corsage Que bossuaient deux seins de la blancheur du lait ; Je sentais des vapeurs m'empourprer le visage ; Plein d'amour et de feu, mon oeil la contemplait, Et s'enflammait devant cette attrayante image. De cette chair rosée émanait une odeur Étrange, qui troublait en charmant ; mais la belle S'aperçut du désir qui me mordait au coeur, Et sur sa blanche peau jetant une dentelle M'effleura le visage avec un air railleur. Si pourtant l'on m'eût dit de succomber sur l'heure, Si, pour l'avoir aimée un moment, j'avais dû Mourir à cet honneur que la volupté leurre, Mourir à tout... Mon coeur, certes, eût répondu : - « L'honneur n'est qu'un vain mot ; qu'elle aime ! et que je meure !... »] Mais elle s'en allait.... et je ne savais où Riche, j'eus tout donné pour un mot de sa bouche ; Pour céder au plaisir de caresser son cou, Brandille qui fuyait comme un jonc de sa souche ; Consumé de désir, j'étais muet et fou. Mon coeur était meurtri comme un marteau d'enclume ; La peur de la laisser échapper me glaçait ; - Tout à coup, son talon sonna sur le bitume ; Elle partit, hélant un cocher qui passait, Et découpant son ombre épaisse dans la brume. IV. ***************** Erreur dans l'interprétation du texte (ligne 372, programme : edition_txt_TOUT.php) Je restai là, cloué sur le sol ; haletant Comme un lion à qui l'on eût pris sa lionne ; Éperdu, furieux, presque stupide ; quand J'aperçus à mes pieds comme une main mignonne ; Oh ! Fortune ! Elle avait oublié là son gant !... Qu'il est doux de baiser le gant de sa maîtresse ! Il était blanc, portant l'empreinte de ses doigts Qu'estompait un trait sombre, avec une finesse Qui me les dessinait, longs, flexibles, étroits.... Et cependant assez larges pour ma caresse. Mon oeil, sous cet étui, voyait sa blanche main Qui semblait aux baisers se livrer d'elle-même. J'y déposai ma bouche ; et la peau de satin Qui passait sous ma lèvre emportait comme emblème, Le sceau dont se marquait mon amour clandestin. Alors, en la suivant, je doublai de vitesse ; Et tandis qu'elle allait s'apprêter à monter En berline, je cours : dans mes bras je la presse, Je la cloue à sa place ; et, sans plus hésiter, Je m'élance en criant au cocher mon adresse... D'abord elle parut effrayée ; elle eut peur : - « En vérité, c'est là pousser trop loin l'audace, » Dit-elle en tressautant ; mais la douce fureur Qui rougissait son front uni comme une glace Avait un bien grand charme, et m'allait droit au coeur. Et puis à ses côtés je pris place... - La flamme Que l'Amour allumait trouvait son aliment ; La volupté semblait m'unir à cette femme ; Je brûlais de rester désormais son amant ; Et d'épancher ainsi mon âme dans son âme. Je lui mis dans la main le gant. - Elle sourit : - « Puisque tu le voulais, que restais-tu muette ? » Lui dis-je. - Mais soudain mon regard l'attendrit : - « Si tu savais comment pour moi la vie est faite, Dit-elle, et me corrompt le coeur et me l'aigrit ! Si tu savais combien sous l'or et l'améthyste Reste pour moi de fiel amer et de douleur ; Combien, en souriant des lèvres, je suis triste, En mon âme, où je sens ramper un ver rongeur ; Peut-être saurais-tu pourquoi je te résiste ! Pendant longtemps aussi je les connus, ces feux ; Tu crois peut-être en moi trouver une amoureuse ; Mais ce tison brûlant qui fascine tes yeux Me dessèche le coeur et me rend malheureuse ; Avant de te donner à moi, connais-moi mieux. Actrice vile, ayant l'alcôve pour théâtre, Je me vends au public qui m'achète l'amour ; Âme de pierre, coeur de bronze, corps d'albâtre, Je les enivre tous et chacun à son tour ; Sans en aimer un seul, contrainte, je folâtre. À des calices saints porte ta bouche d'or ; La coupe que je tends à tes lèvres avides, C'est du poison ; l'Amour la fuit dans son essor ; Pour y avoir trop bu, les miennes sont livides ; N'y trempe pas la tienne, elle est trop pure encor !... » - Sa taille dans ma main ployait avec souplesse ; Nous étions enlacés l'un à l'autre ; ses yeux Se miraient dans mes yeux pleins d'amour et d'ivresse, Sous cette obscurité qu'ils rayaient de leurs feux ; Et ma lèvre effleurait les cheveux de sa tresse. V. ***************** Erreur dans l'interprétation du texte (ligne 372, programme : edition_txt_TOUT.php) L'amour est doux, le soir, à l'ombre d'un tilleul, Quand la mélancolie, avec son grand suaire, Nous enveloppe ; - ainsi qu'un mort de son linceul ; Car la route ici est triste et solitaire, Et le voyage est long alors qu'on le fait seul. Mais s'aimer quand on est deux dans une berline, Qu'on savoure en secret la douceur d'un baiser, Qu'on a devant les yeux une face divine Et le sein d'une blonde où l'on puisse poser Sa bouche qui frémit et son front qui s'incline... Quand, entre deux cahots, l'on se sent ballotté, Effleurant les contours d'une chair qui pantèle, L'amour devient désir ; c'est une volupté ; C'est un plaisir des sens goûté près de la belle Qu'on voudrait posséder pour une éternité... VI. ***************** Erreur dans l'interprétation du texte (ligne 372, programme : edition_txt_TOUT.php) À l'audition : aimable fille. « Qui que tu sois, lui dis-je alors, pucelle ou fille, Je t'aime avec tes yeux d'azur, ton front charmant ; Je t'aime avec ta gorge à l'air, et la mantille Dont tu l'enveloppais au théâtre, au moment Où je cherchais les feux de ton regard qui brille. Tiens, mignonne, je suis à toi ; voilà ma main. Mets la tienne dedans ; reçois cette caresse ; Sois à moi seulement cette nuit ; et, demain, Tu pourras insulter au désir qui m'oppresse Si la fatalité te met sur mon chemin. » - La belle ne disait mot ; elle laissait faire Ma main qui chatouillait l'ampleur de son corset. Son coeur ne battait pas plus fort qu'à l'ordinaire ; Mon haleine effleurait sa lèvre et la berçait... Mais mon coeur se heurtait contre une âme de pierre. - « Ton amour doit viser d'autres filles que moi, Dit-elle amèrement.- Je ne suis qu'une cloche Où manque le battant qui frappe l'air ; mais toi Dont la lèvre frémit quand la mienne l'approche Choisis un coeur qui puisse au moins garder ta foi. » - Je ne l'écoutais pas. - « Si ton coeur est de glace Le mien brûle à côté, sa chaleur suffira. Je te conduis chez moi, viens, j'ai marqué ta place, À nos yeux alanguis le même éclair luira ; L'amour est un bourreau qui jamais ne fait grâce. Auprès de toi, je sens mon désir s'allumer, Si tu n'as pas d'amour, du moins ta bouche est rose ; Tes yeux voluptueux sont faits pour m'enflammer, Et je tressaillerai quand ta lèvre mi-close Viendra me murmurer qu'elle voudrait m'aimer !... » Et la belle, cédant enfin à ma prière, S'était livrée à moi qui voulais l'entraîner ; Et lorsque à l'Angélus, l'église solitaire Tinta ses premiers coups, que j'entendis sonner, L'honneur jetait sur nous son voile mortuaire... Je ne me souviens pas d'avoir jamais aimé Une femme avec plus de fougue et de délire. - Au réveil, dans ce coeur que je croyais fermé, Je pus voir, au travers d'un languissant sourire, La Volupté repue et le désir calmé. S'il en est, dans le cours d'une longue carrière, Dont l'honneur sain et sauf n'ait jamais succombé, Qui puissent sans rougir regarder en arrière, Et n'aient pas à se dire : « Ici je suis tombé, » Qu'ils me blâment ceux-là ; qu'ils me lancent la pierre ! VII. ***************** Erreur dans l'interprétation du texte (ligne 372, programme : edition_txt_TOUT.php) Mais quand pour le départ je la vis se parer, Je sentis comme un fer qui me déchirait l'âme. Blessé dans mon amour, j'aurais voulu pleurer ; Et, coupable, j'aurais été peut-être infâme, Si le crime avait dû ne pas nous séparer !... Alors j'allai chercher près de ma cheminée, Dans ma coupe, un bouton de rose - un souvenir ; Et puisque par amour elle s'était donnée, Je la priai, du moins, de me laisser venir Chez elle, jusqu'à tant que la fleur fût fanée. VIII. ***************** Erreur dans l'interprétation du texte (ligne 372, programme : edition_txt_TOUT.php) Le lendemain, ainsi qu'un paria rêveur, J'errai. - Quand vint le soir, pliant sous ma tristesse Je fus la voir avec de fous désirs au coeur. - Elle dormait... Je pris la main de ma maîtresse ; Mais elle était glacée et je frémis d'horreur !... Je demeurai longtemps comme un fou, sans haleine, Halluciné devant ce tableau ; mais soudain, Je vis, sous un bouton de rose en porcelaine, Ces lignes que je crus écrites de sa main, Et que mes yeux en sang distinguèrent à peine : - « J'ai perdu mon honneur ; j'ai trahi mon serment ; Faible comme un roseau qui sous le vent s'incline, Je n'ai pu demeurer fidèle à mon amant. J'ai voulu, pour lutter, voiler mon origine ; Je meurs à deux amours ; le Ciel me soit clément ! » ==================================================