******************************************************** DC.Title = GUIGNOL EN ENFER, COMÉDIE DC.Author = BESSIER, Fernand DC.Creator = FIEVRE, Paul DC.Publisher = FIEVRE, Paul DC.Subject = Comédie DC.Subject.Classification = 842 DC.Description = Edition du texte cité en titre DC.Publisher = FIEVRE, Paul DC.Contributor = DC.Date.Issued content = DC.Date.Created = DC.Date.Modified = Version du texte du 27/09/2021 à 20:13:53. DC.Coverage = France DC.Type = text DC.Format = text/txt DC.Identifier = http://www.theatre-classique.fr/pages/documents/BEISSIER_GUIGNOLENENFER.xml DC.Source = https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k57435258 DC.Source.cote = DC.Language scheme = UTF-8 content=fr DC.Rights = Théâtre Classique, (creative commons CC BY-NC-ND) *************************************************************** GUIGNOL EN ENFER THÉÂTRE DE GUIGNOL. 1894. Fernand BESSIER PERSONNAGES. GUIGNOL. LE DIABLE. L'APOTHICAIRE.. MAITRE FÉRULARD. DEUX DIABLES. Chez Guignol. Fernand BESSIER, "Théâtre de Guignol", Paris, Librairie théâtrale, 1894, pp. 1-28. GUIGNOL EN ENFER SCÈNE PREMIÈRE. GUIGNOL, seul, entrant. Chantant.Vive la rouge bouteille,Où sommeille,Pris avec la grappe vermeilleUn peu du soleil qui la fit mûrir !Ah ! La, la, la ! Qu'il fait bon vivre, surtout avec des écus dans ses poches. La vie, mais c'est encore ce qu'on a inventé de meilleur en ce bas monde. Ceux qui s'en plaignent sont des fous. Moi je trouve tout bien, tout beau, tout bon. Je mange bien, je ne fais rien, je dors bien ; le lendemain je recommence. Et va comme je le pousse ! - Trouvez-moi une situation plus agréable. Je n'ai plus de dettes. Mes créanciers disparus, envolés. La cabaretière me fait crédit et mon propriétaire m'offre sa fille en mariage ! Allons, saute, Guignol ! - C'est égal, j'ai tout de même la tête un peu lourde. Notre dîner a décidément duré trop longtemps. Polichinelle et Pierrot ronflent sous la table et Arlequin fait un pied de nez à la lune. Je les ai laissés, les chers amis. J'avais hâte d'être un peu saoul. Puis le sommeil commençait à me gagner moi aussi ; et pour dormir, à une nappe de restaurant ou à une natte de salle à manger, je préfère encore mon bon lit, où si doucement je m'enfonce entre les chaudes plumes de mon matelas. Car je possède un matelas ! Le Guignol d'autrefois est mort et enterré tout comme monsieur Marlborough ! On entend sonner minuit.Minuit, déjà. Vite au lit, Guignol, mon ami, dites bonsoir et dormez tranquille jusqu'à demain matin ; faites de beaux rêves et pensez aux plats succulents que vous mangerez demain. Minuit sonne de nouveau, on frappe à la porte.On frappe. À cette heure ! On frappe plus fort.Qui peut venir me déranger ? Haut.Eh dites donc ! Vous repasserez demain, je n'ouvre pas, je dors. On frappe encore.Ah ! Tu sais, je vais cogner. Même jeu.C'est qu'il ne me laissera pas dormir tranquille. Voulez-vous vous taire à la fin ! Allez vous coucher ! Prêtant l'oreille.Tiens ! Il ne frappe plus, il a bien fait. Je vous demande un peu s'il est raisonnable de courir les rues à pareille heure, et par un temps pareil ! SCÈNE II. Guignol, Le Diable. LE DIABLE, surgissant devant lut. Bonsoir, Guignol. GUIGNOL, reculant. Hein ! Qui est là ? Qu'est-ce que c'est que cette mauvaise farce ? LE DIABLE. Tu ne me reconnais pas. GUIGNOL. Attendez donc. Mais si, parfaitement. Ces cornes, cette fourche ; vous êtes le diable ! LE DIABLE. Tu l'as dit. GUIGNOL, lui tendant la main. Et ça va bien, autrement, depuis que je n'ai eu le plaisir de vous voir ? LE DIABLE. Merci. GUIGNOL. Mais par où, diable, êtes-vous entré ? LE DIABLE. Tu ne voulais pas m'ouvrir. GUIGNOL. Ah ! C'est vous qui frappiez ? LE DIABLE. Oui, c'était moi. GUIGNOL. Si j'avais su, croyez... LE DIABLE. Oh ! Ça ne me gênait en rien. La porte fermée, j'ai passé à travers la muraille. GUIGNOL. Drôle d'idée ! Enfin tous les goûts sont dans la nature. LE DIABLE. Et devines-tu pourquoi je suis ici ? GUIGNOL. Pas du tout. LE DIABLE. Tu as la mémoire courte. Rappelle-toi, il y a un an, jour pour jour, à pareille heure... GUIGNOL. Et bien ? LE DIABLE. Tu étais là, n'ayant pas dîné... Tu m'appelais à ton secours. Je vins... Tu demandais d'être riche; je te promis la richesse pendant un an, à une condition. GUIGNOL. Vous croyez... LE DIABLE, continuant. À cette condition que dans un an, à pareil jour, à pareille heure, tu m'appartiendrais. GUIGNOL. Pas possible ! LE DIABLE. Tu as signé, j'ai le papier sur moi. GUIGNOL. Oh ! Vous savez, les papiers ça ne prouve rien. LE DIABLE. Tu ne peux le dédire ; j'ai tenu ma promesse ; il faut tenir la tienne. Aussi dépêche-toi ; fais ton paquet et partons, je suis pressé. On nous attend chez moi. GUIGNOL. Eh là, comme vous y allez ! Ainsi vous êtes sûr que ... LE DIABLE. Parfaitement sûr. GUIGNOL. Et je ne peux pas me dédire. LE DIABLE. C'est écrit. GUIGNOL. Dites donc, si nous le renouvelions. LE DIABLE. Quoi ?... GUIGNOL. Le papier. LE DIABLE. Impossible ! GUIGNOL. Voyons, mon petit diable, mon cher petit diable, si vous étiez bien gentil, bien mignon... LE DIABLE. Impossible ! Nous partons. GUIGNOL. Accordez-moi un an. Si vous saviez, j'ai encore un tas de choses à régler. LE DIABLE. Es-tu prêt ? GUIGNOL, à part. Ah ! Si je pouvais cogner dessus. Haut.Mais... LE DIABLE. Ne discutons plus. GUIGNOL, pleurant. Oh ! La ! la ! la ! LE DIABLE. Nous partons. GUIGNOL. C'est loin ? LE DIABLE. Ne t'inquiète pas... GUIGNOL. Mais cette année a été plus courte que les autres... LE DIABLE. Quel bavard tu fais ! Allons... GUIGNOL. Vous savez ? s'il faut prendre le bateau, je crains la mer. LE DIABLE, le prenant par la main. Enlevé ! GUIGNOL. Ah ! Ils disparaissent. SCÈNE III. L'Enfer. - La scène reste vide un moment, puis on entend la voix de Guignol. GUIGNOL. Hé là ! Hé là ! Doucement, je ne peux plus respirer. Arrêtez ! Arrêtez ! arrêt... Ils paraissent tous les deux. LE DIABLE. Nous voici arrivés. GUIGNOL. Crelotte ! Quel voyage ! J'aime encore mieux le chemin de fer de ceinture. LE DIABLE. Tu ne le regretteras bientôt plus. GUIGNOL, regardant autour de lui. Ainsi me voilà en enfer ? LE DIABLE. Tout à fait. GUIGNOL. Sapristi ! Qu'il fait chaud. LE DIABLE. Oh ! Ce n'est rien encore. Tu n'es ici que dans le vestibule. Ici à droite, l'entrée. GUIGNOL. Faites voir ! LE DIABLE. On ne passe pas ! Une fois entré ici, on n'en sort plus. La porte ne se rouvre jamais pour la même personne. Elle est fermée à sept serrures, et un seul mot prononcé par moi pourrait la faire ouvrir. Ainsi... GUIGNOL. Oh ! Je n'essayerai pas. Du moment qu'il n'y a pas moyen. LE DIABLE, lui motrant. Là, à gauche, la première salle de punition - celle où l'on commence à vous faire griller de temps en temps, avant de vous plonger dans la chaudière, histoire de vous habituer. GUIGNOL. Brr !... Vous allez me faire... Il fait le geste. LE DIABLE. Mais parfaitement... GUIGNOL. Comme un vulgaire merlan. LE DIABLE. C'est la punition qui commence. Tu as assez commis de méfaits sur la terre... GUIGNOL. Voyons, vous n'allez pas faire ça. LE DIABLE. Non, je vais me gêner ! Attends-moi ici. Quand cessera ton tour, on t'appellera. Moi, je vais présider à la mise sur le gril de votre ancien garde champêtre. GUIGNOL. Celui qui m'a si souvent dressé les procès-verbaux. Ça c'est bien fait. LE DIABLE. Tu le vois donc, punir c'est être juste. Allons, adieu ! GUIGNOL, l'arrêtant. Monsieur le diable, voyons... LE DIABLE. Attends-moi là ! GUIGNOL. Mais... LE DIABLE. Tu ne t'ennuieras pas. Tu rencontreras plus d'un visage de la connaissance... GUIGNOL, voulant encore le réunir. Si nous remontions là-haut ? LE DIABLE. Ton tour va venir ! GUIGNOL, même jeu. J'ai oublié mon mouchoir !... LE DIABLE. On t'appellera. Prends patience. Ah ! Ah ! Tu vas y passer, mon ami Guignol ! Ah ! Ah ! GUIGNOL. Monseigneur, mon doux monseigneur, mon... LE DIABLE, t'en allant, riant. Ah ! Ah ! Ah ! SCÈNE III. GUIGNOL, seul. Gueusard ! Bandit ! Vaurien ! Ah ! Si tu n'avais pas la peau si dure, ce que je t'aurais cogné ! Voyez-vous ça ! Le gril ! La marmite ! Ah ! Non alors ! Et moi qui étais bien tranquille. Je ne me méfiais de rien. Il m'a joué, et moi je me suis laissé prendre. Oh ! Mais, ça ne va pas se passer comme ça, je veux m'en aller. Il va à la porte.Cordon, s'il vous plaît ! Rien. Le concierge doit être sorti. L'ouvrir, impossible. Il doit y avoir un autre chemin. Je ne parle pas de celui que nous avons suivi, nous allions si vite que je n'y ai rien vu. Mais un autre. Cherchons. Car je ne veux pas être grillé moi ! Qu'il se fasse griller lui-même, si ça lui fait plaisir ! Je n'aime pas la chaleur. Regardant au fond.Ah ! Quelqu'un. SCÈNE IV. Guignol, L'Apothicaire. GUIGNOL. Pas possible ? Maître Bertuchon, notre ancien apothicaire, ici en enfer ? L'APOTHICAIRE. Tiens ! Guignol ! GUIGNOL. Vous ici ? L'APOTHICAIRE. Parfaitement ! GUIGNOL. Eh bien ! Ça ne m'étonne pas, vous étiez assez voleur, au temps où vous teniez boutique sur la grand' place ; ce que vous nous avez vendu de fioles d'eau claire comme remèdes ! L'APOTHICAIRE. C'est vrai. Mais tous les apothicaires font de même. GUIGNOL. Il l'avoue. L'APOTHICAIRE. Oui - pourquoi le cacherais-je ? D'ailleurs nous sommes presque tous ici, et puis maintenant tu ne peux pas aller le raconter. Entré ici, on n'en sort plus sans permission. Aussi, tu le vois, je porte moi-même mon morceau de bois, pour alimenter le feu. GUIGNOL. Ah ! Vous allez... L'APOTHICAIRE. Oui, sur le gril. GUIGNOL. Ça doit vous gêner sur le moment ? L'APOTHICAIRE. Tu verras ça tout à l'heure. GUIGNOL, à part. J'ai envie de me payer un petit acompte sur lui... UNE VOIX, au dehors. L'apothicaire ! L'APOTHICAIRE. Tu vois, on m'appelle. GUIGNOL, le cognant avec sa tête. Et va donc ! Va donc ! Face à plâtre ! Mais va donc, moule à singe ! L'apothicaire s'enfuit. GUIGNOL. Ouf ! Ça soulage. Reprenons notre inspection maintenant. Il est impossible que je ne trouve pas un moyen de sortir d'ici. J'aurais bien interrogé l'apothicaire, mais je me suis méfié ; un apothicaire, ça ne regarde jamais les gens en face. Si cependant je rencontrais quelqu'un... Ah ! Là-bas... Quelqu'un s'avance. Oui... Non. Si... Mais c'est lui. Le magister Férulard, mon ancien maître d'école : Le garde champêtre, l'apothicaire, le maître d'école ! Ils y sont donc tous, ceux de mon pays. Crelotte. Ah ! C'est bien lui, je le reconnais à sa calotte de velours, marchant en faisant de grands gestes, parlant tout seul. Pourra-t-il me renseigner ? Essayons. SCÈNE V. Maître Férulard, Guignol. GUIGNOL. Eh ! Bonjour, maître Férulard. MAITRE FÉRULARD. Ave... Guignol. GUIGNOL. S'il vous plait ! MAITRE FÉRULARD. Ou bien : Salulem do tibi... GUIGNOL. Si vous vouliez bien ne pas parler chinois. MAITRE FÉRULARD. Pauvre ignorant ! GUIGNOL. Laissez-moi donc en repos. Un conseil, vite, je suis pressé, on peut m'appeler à tout instant. Connaissez-vous un chemin pour sortir d'ici ? MAITRE FÉRULARD. Sais-tu ce que c'est que sortir ? GUIGNOL. Eh bien ? MAITRE FÉRULARD. Sortir est le contraire d'entrer ; c'est-à-dire une action qui par un simple changement des propositions, avec une action identique, produit des effets différents. D'où différence, partie de la définition de la définition d'après les philosophes, dixi : genere proximo et differentia propria. GUIGNOL. Il est encore plus bête que là-haut ! Haut.Vous êtes encore plus bête que là-haut. MAITRE FÉRULARD. Bête ? Sais-tu ce que c'est que bête ? La bête, c'est la partie animale de notre individu... Or notre individu étant... GUIGNOL. Ce que la main me démange... Criant.Connaissez-vous un chemin pour sortir d'ici ?... MAITRE FÉRULARD. On peut ignorer certaines choses que l'on sait. Ainsi... GUIGNOL. Oh ! Ce n'est pas sur le gril qu'il devrait aller celui-là, c'est dans le bocal aux cornichons ! MAITRE FÉRULARD. Tu disais donc, Guignol, mon ami, que ton esprit s'égarant en de vagues conceptions cherchait a priori une porte, laquelle porte, devait primo, être, secundo, pouvoir. GUIGNOL. Ah ! Zut ! Il cogne de la tête.Tiens ! Voilà primo, secundo, difinitivo, et tout le reste. Et aïe donc ! Et aïe donc ! Lazzis. MAITRE FÉRULARD. Ce qui ne m'empêchera pas de protester... GUIGNOL, même jeu. Tiens ! Proteste... LA VOIX, appelant. Maître Férulard ! GUIGNOL, même jeu. Mais va donc ! On t'appelle ! Maître Férulard parait et reparaît encore deux fois et Guignol frappe dessus chaque fois. GUIGNOL, seul. Eh bien ! S'ils sont tous aussi bêtes, ça va être gai ! ? Il regarde. Avec ça, l'appel qui continue. Ah ! Y en a-t-il, y en a-t-il ! Mais je les connais tous ceux-là. Voilà le notaire, la vieille cabaretière, le maréchal-ferrant, le gendarme. Le curé peut en dire, des messes ! Et mon tour qui va venir ! Mon nom qu'on va appeler ! Il faudra répondre. Que faire ? Le diable commande ici. Par la force, rien à faire ; s'il n'y avait qu'à l'assommer je m'en chargerais bien. Mais l'assommer ce n'est guère possible. Si je pouvais lui reprendre mon billet; si je pouvais même mettre un pied dehors, le reste suivrait bien, et une fois dehors, sauvé... LA VOIX, appelle. Guignol ! GUIGNOL. Vlan ! Ça y est. C'est à mon tour. La voix reprend. GUIGNOL. On y va ! On y va ! C'est-à-dire que ça ne me va pas du tout d'y aller, mais du tout. La voix reprend. GUIGNOL. Quel raseur ! On y va ! Et pas une issue, pas un trou où me cacher ; pas une armoire où disparaître ! Tremblant.Il me semble déjà être sur le gril ! Ah ! Saint Bonaventure, mon patron, quel cierge je te brûlerais, si je sortais d'ici ; gros comme un mât de misaine. SCÈNE VI. Le Diable, Guignol. LE DIABLE. Eh bien ! Guignol ! Mon ami, tu n'entends donc pas ? On t'appelle, allons ! Viens, mon petit ! Viens. Le gril est tout rouge, le feu bien ardent. On n'attend plus que toi ! Allons ! GUIGNOL, se reculant, à part. Si je pouvais le mordre, toi. Haut.Si nous remettions ça à demain ? LE DIABLE. Tu ne veux pas venir ? GUIGNOL. Non ! LE DIABLE. Holà ! Mes serviteurs ! GUIGNOL. Quèsaco ? Deux diables paraissent. LE DIABLE. Empoignez-moi ce particulier là, et portez-le sur le gril. GUIGNOL, aux deux diables. Voulez-vous bien me lâcher, vous autres! LE DIABLE. Empoignez ! Les deux diables et Guignol se débattent. - Lazzis. - Bataille. - Finalement, Guignol s'empare d'une des fourches et assomme les deux diables, qui s'enfuient en poussant des cris. GUIGNOL. Si vous en voulez encore, j'en ai autant à votre service ! LE DIABLE. Guignol ! Je vais te faire rôtir tout vif. GUIGNOL. Faudra d'abord me mettre dans la poêle. LE DIABLE. Je vais appeler d'autres diables. GUIGNOL. J'ai la fourche, et vous avez vu si je sais m'en servir ! LE DIABLE. Tu t'en servirais même contre moi ! GUIGNOL. Oh ! La la ! Mais je cognerais double, mon petit père ! Tu vas voir la jolie révolution que je vais te préparer ici ; j'en ferai tant que mieux vaudrait, vois-tu, me renvoyer tout de suite. LE DIABLE. Te renvoyer ! Jamais de la vie, j'ai bien eu trop de peine à l'avoir. GUIGNOL. Alors, gare ! Une fois, deux fois ! Tu ne veux pas ? LE DIABLE, le menaçant de sa fourche. Tremble ! GUIGNOL, lui donnant un coup de la sienne. Reçois ! LE DIABLE, même jeu. Je te ferai bouillir dans une marmite d'huile ! GUIGNOL, même jeu. Pile ! Face ! À qui la belle ? Lazzis. LE DIABLE. Voyons, raisonnons ! À part.Je vais tâcher de le persuader : il m'ameuterait tout l'enfer. Haut.Raisonnons. GUIGNOL. Je le veux bien. Mais de loin. LE DIABLE. Pourquoi ne pas te laisser persuader ? GUIGNOL. Oh ! La persuasion... pour aller sur le gril. LE DIABLE. Eh ! Si je t'accordais quelques douceurs ? GUIGNOL. Sortir ? LE DIABLE. Oh ! Non. Cela, impossible. Je le voudrais que je ne le pourrais pas. GUIGNOL. Ah !... Une idée. Jurez-moi do m'accorder ce que je vais vous demander, et je suis à vous... LE DIABLE. Tu ne me demanderas pas de t'en aller ? GUIGNOL. Non ! LE DIABLE. Alors, je le jure ! GUIGNOL. Devant témoins ! Je n'ai pas confiance. LE DIABLE, à part. Quand je te tiendrai, toi, tu me payeras tout cet arriéré. Il appelle.Holà ! Les deux diables reparaissent et reculent à la vue de Guignol. GUIGNOL. Oh ! N'ayez pas peur. Il s'agit de choses sérieuses. LE DIABLE. Es-tu content ! GUIGNOL. Jurez ! LE DIABLE. Je le jure. GUIGNOL. Bien... Voici... Avant d'aller me faire rôtir, j'éprouve le besoin de jeter vers ce que je laisse un dernier regard. Je ne vais plus rien voir des belles choses que tant j'aimais... Entrouvrez-moi un peu la porte. Laissez-moi passer seulement le bout de mon nez, et je vous suis immédiatement. LE DIABLE. Tu n'essaieras pas de sortir ! GUIGNOL. Je vous le promets ! LE DIABLE. Bien. Aux diables. Ouvrez-lui la porte, mais tenez-la bien. Les diables ouvrent la porte. Très étroite... GUIGNOL. Parfait ! Maintenant, attention ! Le bout de mon nez, je l'ai juré, - seulement, je commence de l'autre côté. Il te retourne et sort à reculons. LE DIABLE. Mais ! GUIGNOL. C'est juré ! Il passe.Et aïe donc ! Et aïe donc ! LE DIABLE. Je suis joué. GUIGNOL. En plein. Il sort à reculons, puis donne un coup de tête dans la poitrine du diable.Bonsoir la compagnie. Il disparaît et ferme la porte. LE DIABLE. Enfermés ! Il est sorti ! Nous ne pourrons plus le ravoir ! GUIGNOL, postant sa tête par l'oeil de boeuf au-dessus de la porte. Bien des choses chez vous. Et excusez-moi si je ne vous reconduis pas ! LE DIABLE. Si jamais je te repince... GUIGNOL. Se laisser prendre deux fois ! C'est bon pour les imbéciles, comme toi ! LE DIABLE. Les autres paieront pour toi, garnement ! GUIGNOL. Moralité : Quand on n'a pas ce que l'on aime, il faut prendre ce que l'on a. Au public.Ainsi finit la comédie. ==================================================