******************************************************** DC.Title = CENDRILLON, OPÉRA-COMIQUE. DC.Author = ANSEAUME, Louis DC.Creator = FIEVRE, Paul DC.Publisher = FIEVRE, Paul DC.Subject = Comédie DC.Subject.Classification = 842 DC.Description = Edition du texte cité en titre DC.Publisher = FIEVRE, Paul DC.Contributor = DC.Date.Issued content = DC.Date.Created = DC.Date.Modified = Version du texte du 28/07/2022 à 15:47:54. DC.Coverage = Pays féérique DC.Type = text DC.Format = text/txt DC.Identifier = http://www.theatre-classique.fr/pages/documents/ANSEAUME_CENDRILLON.xml DC.Source = http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5734399x DC.Source.cote = DC.Language scheme = UTF-8 content=fr DC.Rights = Théâtre Classique, (creative commons CC BY-NC-ND) *************************************************************** CENDRILLON OPÉRA-COMIQUE M. DCC LIX. Avec Approbation et Privilège du Roi. De Mr. ANSEAUME. À Paris, Chez N.B. DUCHESNE. Librairie ; rue Saint-Jacques, au-dessous de la Fontaine Saint Benoît, au Temple du Goût. Représentée pour la première fois à la Foire Saint-Germain, le 20 Février 1759. ACTEURS CENDRILLON, Mlle Villemont. LA MARAINE, Mlle Constantin. LA SOEUR AINÉE, Mlle Vincent. LA SOEUR CADETTE, Mlle Deschamps. AZOR, M. La Ruette. PIERROT, M. Paran. UN OFFICIER, M. Delisle. UN SUISSE, M. Moreau. CHOEUR DES FEMMMES. La Scène est dans la maison de Cendrillon et ensuite dans le Palais d'Azor. SCÈNE PREMIÈRE. CENDRILLON. Air : La sagesse est de bien aimer N°1Des rigueurs d'un cruel destin,Aurai-je toujours à me plaindre ?Un faible espoir me luit en vain,Je n'en ai pas moins tout à craindre.Des rigueurs d'un cruel destin, Aurai-je toujours à me plaindre ? Récitatif De M. de la Ruette. N°2J'ai joui cette nuit du spectacle enchanteur,Qu'étale aux yeux la Cour la plus brillante ;Un Prince à mes genoux exprimait son ardeur...Il ne me reste hélas ! de toute ma grandeur, Qu'un souvenir qui me tourmente. Air : De tous les Capucins du Monde.J'aperçois venir ma Maraine,Sa présence augmente ma peine ;À ses lois j'ai désobéi ;Quel reproche elle va me faire ! Seule sensible à mon ennui,Elle me tenoit lieu de mère. SCÈNE II. La Maraine, Cendrillon. LA MARAINE. Air: Le moyen de faire autrement. Du Peintre amoureux, N° 3.Ah ! Dans quel état je vous vois !Ne cherchez point d'excuse ;Je devine aisément pourquoi Vous n'avez point suivi ma loi. CENDRILLON. Il est vrai, j'en suis confuse,J'en suis confuse. LA MARAINE. Ah ! vraiment, je le crois :Mais pourquoi ce manque de foi, Ce manque de foi ?Fillette toujours raisonne,Et n'écoute personne,Quand on s'oppose à son penchant. CENDRILLON. Non, non, c'est que, ma Bonne, Bis.Je n'ai pas pu faire autrement. LA MARAINE. Il fallait n'en croire que moi ;Il fallait mieux suivre ma loi. CENDRILLON. Il est vrai, mais ma folieEst bien punie ; Un moment !... LA MARAINE. Un momentFait effet :On s'y plaît,On s'en fait Un amusement. CENDRILLON. Pardon, ma Bonne,Pardon, ma Bonne,Je n'ai pas pu faire autrement. LA MARAINE. Oui ! Oui ! CENDRILLON. Pardon, ma Bonne,Je n'ai pas pu faire autrement. Bis. LA MARAINE. Air : Si Diogène était réputé sage.Par un effet de mon pouvoir magique,Pour relever l'éclat de vos appas,Je vous ai mis un habit magnifique, Nombreux cortège accompagnait vos pas,Je n'exigeais de votre obéissanceQue de sortir du bal avant minuit ;Faute d'avoir observé ma défense,De mes bontés vous perdez tout le fruit. CENDRILLON. Air : de Monsieur La Ruette. N° 4.Je le sais bien,J'ai tout perdu ;En moins de rien,Tout a disparu :Que le sort me traite, S'il veut, sans pitié ;Non, je ne regretteQue votre amitié, LA MARAINE. Air : De tout temps le jardinage.Vous me serez toujours chère ;Ne craignez plus ma colère. CENDRILLON. Ah ! Que mon coeur est content ! LA MARAINE. Mais par un aveu sincère,Je veux savoir le mystèreDe ce long retardement. CENDRILLON. Air : La Fustemberg.Vous m'allez gronder encore. LA MARAINE. Non, vous dis-je, ne craignez rien ;Il faut bienM'apprendre ce que j'ignore ;Croyez-moi, c'est pour votre bien. CENDRILLON. Je n'en doute pas, Madame, Il faut donc vous ouvrir mon âme.Qui m'eût dit qu'un bal... LA MARAINE. Hé bien ! Ce bal ? CENDRILLON. Dut m'être si fatal ! LA MARAINE. Que vous me causez d'alarmes ! Mais, comment donc ?Quelle raison, Bis.Vous fait verser des larmes ? CENDRILLON. J'en ai bien sujet. LA MARAINE. Quel est ce secret ? Qu'est-ce qu'on vous a fait ? CENDRILLON. Air : D'm'avoir instruit de mon bien.J'arrivai dans le PalaisD'aise transportée ;De tout ce que je voyais,J'étais enchantée, Un Prince... LA MARAINE. Ah ! Nous y voilà. CENDRILLON. Un Prince s'est trouvé là. LA MARAINE. Vous a-t-il fâchée ?Ô gué !Vous a-t-il fâchée ? CENDRILLON. Air : L'honneur dans un jeune Tendron.Le connaissez-vous ? LA MARAINE. Oui, vraiment. CENDRILLON. N'est-il pas vrai qu'il est charmant ? LA MARAINE. Si vous voulez même adorable ;Laissez-là son mérite à part ;Voyons en quoi ce Prince aimable Aurait pu vous manquer d'égard. CENDRILLON. Air : Les yeux baissés par modestie. N° 5.Les yeux vers moi tournés sans cesse,Tendrement il me regardait,De ses regards la douceur et l'ivresse.M'inspiraient ce qu'il ressentait. Bis.À mes côtés est une place,Il s'en saisit ;Il s'enhardit,Je m'attendris ;Je veux le fuir, et je ne puis, Je veux fuir et ne puis, Bis.Je veux le fuir, et je ne puis.Déjà mon trouble augmentait son audace,Quand minuit sonna,Et tout finit là. Air : Plus inconstant.Comme un éclair, soudain je prends la fuite ;En entendant l'heure qui me chassait ;On se met à ma poursuite,Mais en vain on me cherchait... Air : Folies d'Espagne.Je n'étais plus ce qu'ils me croyaient être, Ils me voyaient sans suite et sans éclat ;Comment, hélas ! M'auraient-ils pu connaître !Je m'ignorais moi-même en cet état. LA MARAINE. Air : Le Pont d'Avignon.Ce changement n'a rien qui doive vous surprendre ;Je crains plutôt pour vous un sentiment trop tendre. CENDRILLON. Air : Dondaine.Je ne saurais vous le cacher,Je ne saurais vous le cacher,Ce Prince a trop su me toucher ;Je l'aime, je l'aime :Le croyez-vous épris pour moi de même ? LA MARAINE. Air : De Joconde.Si vous l'aviez trop rebuté... CENDRILLON. Oh ! non. LA MARAINE. Je dois le croire ;Si vous n'avez rien accordé,Qui blesse votre gloire. CENDRILLON. Je sais trop ce que je me dois ; Pour me laisser surprendre ;Il n'a rien obtenu de moi,Que ce qu'il m'a su prendre. LA MARAINE. Air : Des Francs-Maçons.Et que vous a-t-il pris ? CENDRILLON. Ma Bonne...Que dire, hélas ! LA MARAINE. Répondez-moi, je vous l'ordonne ? CENDRILLON. Quel embarras ! LA MARAINE. Et pourquoi donc ces sots scrupules ?Surcoût craignez de me tromper. CENDRILLON. Il m'a pris une de mes mules ; Qu'en fuyant j'ai laissé tomber. Air : Entre l'Amour et la Raison.Je n'en ai plus qu'une à présent; LA MARAINE. Consolez-vous, ma chère enfant,On peut réparer ce dommage Au fond je n'y vois pas grand mal. Que de Beautés sortant du BalOnt souvent perdu davantage ! Air : Quand je tiens de ce jus d'Octobre.Vos soeurs en reviennent sans doute,Ce bruit annonce leur retour ;Rentrez, et quoi qu'il vous en coûte ; Tâchez de vaincre votre amour. Elles sortent. SCÈNE III. Les Deux Soeurs. L'AÎNÉE. Air : Non, je n'aimerai jamais que vous.Rien, en vérité n'est si plaisant ;Nos appas ont fait fortune assurément :Rien, en vérité, n'est si plaisant,À chaque moment, C'était nouveau Galant.Ce gros caissier qui croyait me connaître,M'a-t-il tenu des propos assez doux ? LA CADETTE. Ce Sénateur, en léger Petit-Maître,M'a-t-il assez étalé ses bijoux ? Rien, en vérité, n'est si plaisant ;Nos appas ont fait fortune assurément :Rien, en vérité, n'est si plaisant,À chaque moment,C'était nouveau Galant. Air : Tout roule aujourd'hui dans le monde.Mais cela ne me touche guère ;Je dédaigne de tels objets. L'AÎNÉE. Sans crainte de passer pour fière,Je porte plus haut mes projets.Le destin qui pour moi s'apprête Flatte mon coeur ambitieux. LA CADETTE. Une plus illustre conquêtePeut seule contenter mes voeux. L'AÎNÉE. Air : Avec un air de mystère.Un Amant pour moi soupire,Dont je dois taire le nom. LA CADETTE. Quelqu'un, que je n'ose dire,De son coeur m'a fait le don. L'AÎNÉE. Mais à t'en faire un mystère,Mon amitié souffrirait. LA CADETTE. Pour une soeur aussi chère, Puis-je avoir quelque secret ? L'AÎNÉE. Air : Tout consiste dans la manière.Si j'obtiens ce que je désire ,Vous en sentirez les effets. LA CADETTE. Si j'atteins le but où j'aspire,C'est pour combler tous vos souhaits. L'AÎNÉE. Oui, disputons cet avantageEntre nous deux ;Le bonheur qu'ainsi l'on partageSe goûte mieux. LA CADETTE. Air : Tomber dedans.Quel est ce captif glorieux , Qu'Amour met en votre puissance ? L'AÎNÉE. Quel est cet amant dont les feuxEnflent si fort votre espérance ? LA CADETTE. Devinez. L'AÎNÉE. Non, dites-le moi. LA CADETTE. Ma chère, c'est le fils du Roi. L'AÎNÉE. Le fils du Roi !Le fils du Roi ! LA CADETTE. Et oui vraiment, le fils du Roi. L'AÎNÉE. Air : Mon petit doigt me l'a dit.La conquête est glorieuse ! LA CADETTE. Ne suis-je pas bien heureuse ? Il veut me donner sa foi.C'est votre tour à me dire,Quel amant suit votre empire. L'AÎNÉE. C'est, ma soeur, le fils du Roi. LA CADETTE. Air : Dieu des Amants.Le fils du Roi ! Vous raillez, je crois ! L'AÎNÉE. Non, vraiment ; rien n'est plus véritables. LA CADETTE. Je n'en crois rien. L'AÎNÉE. Moi, je le crois bien ;Votre avis ne détruit pas le mien. Vous êtes fort aimable,J'en conviendrai ; mais,Malgré tous vos attraits,Croyez qu'on est capable,Quand on le voudra, D'effacer ces traits là. LA CADETTE. Ce n'est pas vous. L'AÎNÉE. Ce sera moi. LA CADETTE. Mais il faut être de bonne foi :Jusqu'à présent votre beauté,En vérité, N'a point trop éclaté. L'AÎNÉE. Petite impertinente ! LA CADETTE. Eh ! Bien, j'avouerai,Partout je publierai,Que vous êtes charmante ; Sûre qu'en ce point,On ne me croira point. L'AÎNÉE. Air : Jupin dès le matin.Vous me poussez à bout,Vous cherchez, en tout,À combattre mon goût ; Votre humeurMontre tant d'aigreur,Qu'à nous séparer,Il faut vous préparer :Un excès de fierté, De vanité,Sans rime ni raison,Vous donne un ton ;Il semble qu'en ces lieux,Jeunes et vieux Viennent se brûler aux feuxDe vos yeux :Vous voyez cependant,Le plus souvent,Qu'on vous laisse à l'écart ; C'est un hasard,Quand quelque freluquetDaigne sourire à votre air coquet. LA CADETTE. Air : Plus les amants vivront.Criez tout à loisir :Un jour à venir, Je saurai répondre ;Je vais, pour vous confondre,Monter au rangQui m'attend. L'AÎNÉE. À ce rang désiré , On peut me conduire ;Je vous y préviendrai. LA CADETTE. Vous me faites rire ! L'AÎNÉE. Cendrillon, que je vois là,En jugera. SCÈNE IV. Les Deux Soeurs, Cendrillon. LA CADETTE. Suite de l'air.Qui de nous deuxTe paraît la plus belle ? L'AÎNÉE. Qui de nous deuxInspire plus de feux ? LA CADETTE. Laissez-moi parler. L'AÎNÉE. Taisez-vous, Péronnelle, À Cendrillon.Sans dissimuler... LA CADETTE. Oui, conviens que c'est elle. ENSEMBLE. Ne finirez-vous pasTout ce tracas ? Il me fatigue fort ;Vous ayez tort,Mais, mais, très grand tort,D'oser encorPrendre un tel essor. L'AÎNÉE. Air : La mort pour les malheureux.Décide donc entre nous. CENDRILLON. Que voulez-vous ? LA CADETTE. Je te l'ai déjà dit,C'est qu'il s'agit... L'AÎNÉE. De savoir qui des deux Peut mériter le mieux.L'hommage d'un Prince amoureux. LA CADETTE. Ce Prince est le fils du Roi. CENDRILLON. Le fils du Roi ! LA CADETTE. Il est épris de moi. L'AÎNÉE. Non, c'est de moi ;C'est de moi, sur ma foi. LA CADETTE. Cela suffit :Je sais ce qu'il m'a dit. L'AÎNÉE, à Cendrillon. Dis-nous donc Quelque raison.Te voilà bien rêveuse ! CENDRILLON, à part. Sûrement,C'est mon amant ;Ne suis-je pas bien chanceuse ? Ceci pour moi tourne mal. LA CADETTE. Cette nuit nous étions au bal. CENDRILLON, à part. Au Bal ! C'est mon inconstant,C'est mon perfide amant ! LA CADETTE. Parle-nous donc, si tu veux. CENDRILLON. Je n'oserais...Vous avez toutes deuxMêmes attraits ;Qui voudrait faire un choix,Aurait besoin, je crois, D'y regarder plus d'une fois :Mais qui sait si quelqu'objet,Bien moins parfait,De ce beau Prince-là,N'a pas déjà Su captiver le coeur ? LES DEUX SOEURS, ensemble. Non, non, ma soeur :Moi seule ai cet honneur. , LA CADETTE. Certain objet, à tout le monde inconnu,Au Bai s'est pourtant vu. D'abord le Prince attaché sans cesse à ses pas... CENDRILLON. Hé bien ? LA CADETTE. Semblait en faire cas. CENDRILLON. Avait-elle des appas ? LA CADETTE. Beaucoup. L'AÎNÉE. Très peu. LA CADETTE. Près d'elle, j'en fais l'aveu, Vous n'auriez pas beau jeu. L'AÎNÉE. Le méchant esprit! LA CADETTE. Oui, c'est par dépitQue vous en parlez. CENDRILLON. Vous vous querellez Pour un rien. L'AÎNÉE. Tais-toi,Il te sied, ma foi,D'oser me faire la loi. CENDRILLON. À vos débats,Moi, dame, je ne prends aucune part ; Ne doit on pasL'une pour l'autre avoir quelque égard ? LA CADETTE. Garde tes leçons ;Adieu, nous verrons.Qui l'emportera. L'AÎNÉE. Oui, oui, l'on verra :Adieu donc, ma soeur ;Dans votre grandeur, Soyez de meilleure humeur. Elles sortent. SCÈNE V. CENDRILLON, seule. Air : Quel amour fut aussi tendre ! De Nina.À me nuire, Tout conspire ;Ô sort, quelle est ta rigueur ! Bis.D'Amour un trait me déchire ; Bis.Et c'est encore un malheur ! Bis.Deux rivales se déclarent. Que deviendra mon ardeur ?Des maux qui sur moi se préparent,Le plus sensible à mon coeurSerait d'aimer un trompeur,À me nuire, Tout conspire ;Ô sort, quelle est ta rigueur ! Bis.D'Amour un trait me déchire ! Bis.Et c'est encore un malheur ! Bis. SCÈNE VI. Cendrillon, La Maraine. CENDRILLON. Air : Au bord d'un ruisseau je file.Voyez une infortunée. LA MARAINE. Quels nouveaux malheurs ;Font naître vos douleurs f CENDRILLON. Ne suis-je donc condamnée ;Qu'à vivre toujours dans les pleurs ?Vous avez assez vu, Madame, Quel objet a touché mon âme. LA MARAINE. Hé ! Bien. CENDRILLON. Ce funeste vainqueur,Que j'adore au fond de mon coeur,Peut-être n'est qu'un imposteur ;Mes soeurs se disputent l'amant Qui cause aujourd'hui mon tourment. LA MARAINE. Air : Grand Saint-Martin, ou la Sarabande d'Issé.Vos soeurs ne sont que des ambitieuses :D'un seul regardPar hasardÉchappé, Leur esprit s'est frappé.Sur tous les cours ces OrgueilleusesCroient avoirUn pouvoir.Quand leur Beauté surpasserait la vôtre, II est un art qui manque à l'une et l'autre,Qui seul peut allumer une constante ardeur ;Cet art, c'est la douceur. Air : Du Précepteur d'Amour...C'est la première des vertusDont se doit parer une Belle ; C'est la ceinture dont VénusRetient les Amours auprès d'elle. CENDRILLON. Air : Reçois dans ton galetas.À juger par leurs discours,Mes soeurs ont raison de croireQu'on les aime. LA MARAINE. Vains détours De sottes qui s'en font accroire.D'un Prince qui veut s'amuser,Un mot a pu les abuser. CENDRILLON. Air : Pourvu que Colin, ah ! Voyez-vous.Mais cependant... LA MARAINE. Mais s'il avaitUne telle manie, , Un jour il se repentiraitD'avoir fait la folie. CENDRILLON. Bon ! Si d'un autre il est l'époux,Qu'il s'en repente ou non, voyez-vous,Je n'en serais, ne vous déplaise, Guère plus à mon aise. LA MARAINE. Air : Avec moi vous faites comparaison.Mais comment donc l'Amour en peu de temps ;A fait chez vous des progrès surprenants ! On entend derrière le Théâtre un bruit de tambour. CENDRILLON. Air : Je m'sentais là-dedans.Qu'est-ce donc que j'entends ? LA MARAINE. Je vous en rendrai compte ; Demeurez un instant >Je reviens sur le champ. CENDRILLON. D'un amoureux penchant,Ma Bonne me fait honte ;Et veux que je surmonte Ce qui me fait plaisirEncore à ressentir. SCÈNE VII. CENDRILLON, seule. Air : de M. La Ruette. N° 6.Amour, dont je ressens la flamme,Épargne un faible coeur qui se livre à tes coups ;Les traits dont tu blesses mon âme Font-ils l'effet de ton courroux ?Fais briller à mes yeux un rayon d'espérance,Ou rend-moi mon indifférence ;Mon sort me paraîtra plus doux. SCÈNE VIII. Cendrillon, Les deux soeurs, Un Officier du roi, accompagné d'un tambour. L'AÎNÉE. Air : L'Allemande Suisse.Est-il bien vrai ? L'OFFICIER. Oui, sans délai,Il faut, Mesdames, que chacune vienne. LA CADETTE. Et savez-vousCe que de nousLe Roi demande aujourd'hui ? L'OFFICIER. Oui.Le Prince AzorFait à la fin un effort ;Lui qui d'Amour a toujours fui la chaîne,Il veut avoir, Une épouse dès ce soir,Parmi les Belles du canton. LES SOEURS. Bon. L'AÎNÉE. Déjà je vois,Je prévois Où ce choixPeut tomber. LA CADETTE. Vous pourriez bien vous tromper,Ma Reine. L'AÎNÉE. Je ne suis pas, En ce cas,Seule ici,Qui pourrait en avoir le démenti. LA CADETTE. Si. L'AÎNÉE. À cet Hymen glorieux, Vous pouvez bien toutes les deuxPrétendre ;Certaine épreuve on fera,Qui sur ce point décidera. LES SOEURS. Ah ! LA CADETTE. Quelle est cette épreuve-là ? L'OFFICIER. Vous ne pouvez en ce moment l'apprendre ;Adieu. Ce soir on sauraPour qui feraCe prix-là. LES DEUX SOEURS. Ah ! L'AÎNÉE. Air : Faut-il qu'une fi faible plante.À l'insu de ma soeur cadette,Monsieur, dites-moi franchementSi, dans l'hymen qui se projette,On parle de moi. L'OFFICIER. Non, vraiment. L'AÎNÉE. Vous badinez ? L'OFFICIER, à part. Sur ma parole, La pauvre Demoiselle est folle. LA CADETTE. Même air.Sans en rien dire à mon aînée,Avouez moi, mon cher Monsieur,Que le Prince ; en cette journée,Va s'expliquer en ma faveur ? L'OFFICIER. Nenni. LA CADETTE. Vous n'êtes pas sincère. L'OFFICIER. Oh ! parbleu, les deux-font la paire. Air : Ces Filles sont si sottes.Eh ! Quel est ce joli minois,[Note : Tapinois : qui ne se dit que dans le burlesque. Il est venu en tapinois ; c'est à dire secrètement, sourdement et sans faire de bruit. [F] Voir Molière, Les Pécieuses ridicules et Somaize même titre.]Qui nous écoute en tapinois ? L'AÎNÉE. C'est une pauvre fille. LA CADETTE. Qui nous visite quelquefois. L'OFFICIER. Elle est, ma foi, gentille ! Bis. CENDRILLON, à part. Air : On n'aime point dans nos forêts.Eh quoi ! Mes soeurs, en ce moment,Rougissent de me reconnaître ! L'OFFICIER. Approchez donc, la belle enfant ; On ne risque rien de paraître,Quand on posséde tant d'appas. L'AÎNÉE, à Cendrillon. Voulez-vous bien aller là-bas ? Air : Du manchon. À l'officier.Pour peu que le coeur vous en dise,Soyez avec nous moins discret : Comme à nos soins elle est commise,Votre hymen serait bientôt fait. L'OFFICIER. J'accepterais des offres si flatteuses,Si vous étiez moins curieuses ;Mais là-dessus, Tous vos efforts sont superflus ;Attendez à ce soir,Pour tout savoir,Attendez à ce soir. Il sort. SCÈNE IX. L'aînée, La Cadette, Cendrillon. L'AÎNÉE. Air : Mariez, mariez-moi.Enfin voici le moment, Où mon triomphe s'apprête ;La main d'un Prince charmantVa devenir ma conquête ;Préparons, préparons, préparons tout,Pour briller à cette fête ; Préparons, préparons, préparons tout,Pour l'affermir dans son goût. LA CADETTE. Air : Pour t'avoir, le grivois te guette.Par le secours de la toilette,Rendons ma beauté si parfaite,Qu'Azor puisse en mes yeux Retrouver encor de nouveaux feux.Dieux ! S'il répond à ma tendresse,Quelle fera mon allégresse !Cendrillon, dépêchons ; tôt, tôt,Apportez ce qu'il faut, Je veux partir bientôt. L'AÎNÉE. Air : T'as pied dans le margouillis.Oh ! Faites comme il vous plaira ;Sa seule affaireEst de me plaire ;Oh ! Faites comme il vous plaira ; Je retiens Cendrillon pour cela. Air : Comme un Coucou.Qu'on apporte ici ma toilette. LA CADETTE. Qu'on apporte la mienne aussi. L'AÎNÉE. Je céderais à ma cadette ! LA CADETTE. Oh ! L'âge ne fait rien ici. CENDRILLON. Air : À l'envers.Par qui faut-il que je commence ? LA CADETTE. C'est par moi. L'AÎNÉE. Oh ! Vous voulez prendre l'avance,Je le vois.Mais quittez ce fol espoir. LA CADETTE. Il faut voir. On apporte deux toilettes toutes dressées. L'AÎNÉE. Air : On prend femme, c'est l'usage. Noté dans L'Heureux déguisement.Allons vite qu'on m'arrange. Bis. LA CADETTE. Je vous trouve fort étrange. Bis.Cendrillon, venez m'aider,Laissez-la s'accommoder. L'AÎNÉE. Vous parlez bien à votre aise :Attendez, ne vous déplaise,Qu'elle ait posé mes rubans :Cendrillon n'a pas le temps. Bis. LA CADETTE. Ah ! Si vous êtes la maîtresse, Il est juste qu'on se presse. L'AÎNÉE. C'est vous qui faites la Princesse ;Tout vous choque, tout vous blesse. ENSEMBLE. Quatre fois.Madame fait la Princesse,Madame fait la maîtresse. CENDRILLON. Trois fois.Si vous parlez toutes les deux,Comment répondre à vos voeux. L'AÎNÉE. Raisonneuse ! Bis. LA CADETTE. Paresseuse ! Bis. L'AÎNÉE. Faut-il, quand on dit un mot, [Note : Être de tous écots : se mêler de toutes choses. [L]]Que vous soyez de l'écot ? CENDRILLON. Me gronderez-vous sans cesse,Quoique je n'aie aucun tort ? L'AÎNÉE. Encore ? LA CADETTE. Aurez-vous bientôt fini ? Songez-vous que l'heure presse ? Bis. L'AÎNÉE. Si je le sais ? Vraiment oui ;Eh ! vraiment oui.Mais quel démon vous transporte,De la presser de la sorte ? Pour finir plus promptement,Elle m'assomme la tête,La maladroite, la bête !Elle m'assomme la tête : À Cendrillon.Allez donc plus doucement, Bis.Plus doucement. CENDRILLON. Je ne puis mieux faire,Mieux faire. L'AÎNÉE, la repoussant. Ôte-toi de là. LA CADETTE, la repoussant aussi. Ôte-toi de là. Va-t-en, va-t-en, va-t-en ma chère,De tes soins on se passera ;Ôte-toi de là, ma chère ;Et pour ma soeur garde ce soin,Je n'en ai plus aucun besoin. Bis. La Maraine entre ; les deux soeurs sortent en lui faisant une grande révérence et en chantant.Suivons l'Amour, c'est lui qui nous mène. SCÈNE X. Cendrillon, La Maraine. LA MARAINE. Air : Où s'en vont ces gais bergers.Où vont-elles si gaiement ? CENDRILLON. Ce n'est point un mystère ;Vous savez l'événement,À mon amour contraire. Azor les mande au Palais.Quelle triste nouvelle !Pourra-t-il, en voyant tant d'attraits,Ne pas m'être infidèle ? LA MARAINE. Air : Je suis un bon soldat.L'espoir qui les conduit, Les séduit ;Soyez moins alarmée ;Vous verrez leurs projetsSans effetsSanS aller en fumée. Air : Pour voir un peu comment ça f'ra.Ce sont autant de pas perdus ;Elles sont bien loin de leur compte ;J'en sais plus qu'elles là-dessus,Elles n'en auront que la honte. .L'épreuve qu'on doit exiger, Va les confondre et vous venger. CENDRILLON. Air : Vous voulez me faire chante[r].De quelle épreuve parle-t-on ? LA MARAINE. Je ne puis vous le dire .Suffit qu'en cette occasionsRien ne saurait vous nuire ; Vous en aurez tout l'agrément,C'est moi qui vous l'assure.Allez au Palais seulement,Et tentez l'aventure, Air : Préparons-nous pour la fête nouvelle.II faut aller disputer la victoire : Ce jour est celui de la gloire ;La Fortune et l'Amour veulent vous couronner. CENDRILLON. À cet espoir flatteur dois-je m'abandonner ? LA MARAINE. Air : Alarmez vous.Partez vous dis-je, allez en assurance CENDRILLON. Très volontiers. Mais... LA MARAINE. Quoi ? CENDRILLON. Ma bonne. LA MARAINE. Eh bien ? CENDRILLON. Air : Non, je ne ferai pas.Peut me montrer avec plus de décence,Ne faut-il pas ?... LA MARAINE. Non, non, il ne faut rien. CENDRILLON. Air : Non ; je ne ferai pas.Eh ! Quoi ! Vous prétendez que parmi tant de Belles,Dont l'art relève encor les grâces naturelles,Dans l'état où je suis j'irai me présenter ! Azor m'oserait-il seulement regarder ? LA MARAINE. Air : Les petits riens.Votre beauté,Cet heureux don de la Nature,Votre beauté,Vous dédommage avec usure. N'altérez point par l'impostureCette aimable simplicité ;La plus élégante parure,C'est la beauté. CENDRILLON. Air : Ne v'là-t-il pas que j'aime ?Je souscris à vos volontés : Guidez mon ignorance ;Je dois répondre à vos bontésPar mon obéissance. Elles sortent. Le théâtre change, et représente l'appartement du Prince. SCÈNE XI. AZOR, seul. Ô toi qui me punis de mon indifférence,Amour, Amour, j'implore ta clémence ; Mon coeur en ce moment abjure son erreur.Ah ! Si mon repentir désarme ta rigueur,Fais-moi connaître ce que j'aime ;Fais encor plus pour mon bonheur,Fais que j'en sois aimé de même. SCÈNE XII. Azor, Pierrot. PIERROT. Air : Vous me l'avez dit, souvenez-vous en.Vous qui faisiez l'esprit fort ;Vous sentez donc votre tort ;Vous parliez différemment ;Je vous l'ai prédit, souvenez-vous en,Je vous ai prédit qu'Amour Vous jouerait un mauvais tour. AZOR. Air : Je ne sais pas écrire.Mon ordre a-t-il été suivi ? PIERROT. Seigneur, vous ferez obéi ;On vient de me l'apprendre.Quel sabbat nous aurons ici ! Toutes nos Dames à l'enviOnt promis de s'y rendre. AZOR, vivement. Air : Je ne verrai plus ce que j'aime.Je rêverai donc ma Déesse :Un Dieu propice à ma tendresse,À mes désirs pressants va la rendre aujourd'hui... PIERROT. Air : Ici sont venus en personne.Par ma foi, vous aurez beau faire ;Cet objet qui vous a su plaireNe vous sera jamais rendu. AZOR. Pourquoi donc ? PIERROT. C'est quelque chimère,Une ombre, un être imaginaire ; Hier, quand elle a disparu,On a cherché tant qu'on a pu,Elle s'est trouvée... introuvable ;Pour moi je crois que c'est le DiableQui sous ce minois simple et doux, S'est voulu divertir de vous. Air : De l'horoscope accompli.Laissez-donc là cette chaussure ;À quoi peut être vous servir ?Croyez vous y voir la figureDu tendron qui vous fait souffrir ? AZOR, tenant le mule. Vois, Pierrot, quelle gentillesse ! PIERROT. Je vois plutôt votre faiblesse. AZOR. Le joli pied ! Ah ! Qu'il me plaît ! PIERROT. Oui, mais tient-il ce qu'il promet ? Air : Boire à son tour.Par cet échantillon, Vous jugez d'une Belle ;Vous perdez la raison ;Pardonnez à mon zèle ;Mais, en honneur,C'est une erreur ; Souvent le pied le plus mignonSert à porter, une laid'ron,Une laid'ron. AZOR. Air : Que ne suis-je la jonquille ! ou l'Amant frivole.Je me fuis fait à moi-mêmeLes reproches les plus forts ; Du destin la loi suprême,Triomphe de mes efforts.Loin de blâmer ma tendresse,Sers plutôt, sers, mon ardeur ;Et respecte une faiblesse, Où j'attache mon bonheur. PIERROT. Air : Lassi, lasson, la son bredondaine.J'y ferai diligence,Comptez, comptez sur ma vigilance :J'y ferai diligence. On entend un bruit confus de plusieurs femmes derrière le Théâtre. SCÈNE XIII. Plusieurs Femmes derrière le Théâtre, Un Suisse défendant la porte, Azor, Pierrot. PIERROT. Mais qu'est-ce que j'entends ? LE SUISSE, repoussant les femmes. Doucement, doucement, doucement. PIERROT. Ah ! Quel charivari,Nous allons voir ici !Un régiment de Belles,En beaux atours, en modes nouvelles, Malgré les Sentinelles,Entrent dans le moment. LE SUISSE. Doucement, doucement, doucement. LE CHOEUR DES FEMMES. Air : Ah ! Madame Anroux.C'est l'ordre du Roi ;Monsieur, laissez-moi, Passer, je vous prie.C'est l'ordre du Roi ;Je vous en supplie,Monsieur, laissez-moi. LE SUISSE. Si vous n'y prenir garde, Bis.Moi, de mon hallebarde,Je donne un coup à toi. LE CHOEUR DES FEMMES. C'est l'ordre du Roi;Monsieur laissez-moi. ; LE SUISSE. Personne n'y passe. LE CHOEUR. C'est l'ordre du Roi. LE SUISSE. Je ferai main basse,Jarni, par mon foi. Toutes les femmes entrent. SCÈNE XIV. La Choeur des femmes, Azor, Pierrot. PIERROT. Air : Lassi, Lasson, la sonbredondaine.Voici nos aspirantes ;Voyez, voyez ; qu'elles sont charmantes ! Voici nos Aspirantes ;Défendez bien, Seigneur,Votre coeur,Votre coeur. Air : Sexe charmant dont le partage.Aimez-vous la blonde ou la brune ? Ici l'on a de quoi choisir...Ne les faites donc pas languir. À part.Pourquoi faut-il n'en prendre qu'une ?J'en vois beaucoup qui dès ce soir,Accepteraient bien le mouchoir. LA SOEUR AÎNÉE, à Azor. Air : Je donnerais les revenus.Je viens, Seigneur... LA CADETTE. Avec grande impatience.... L'AÎNÉE. Jouir d'un honneur.... LA CADETTE. J'ai couru, Seigneur... L'AÎNÉE. Pour moi bien flatteur. LA CADETTE. Sitôt votre ordre venu... L'AÎNÉE. L'aurais-je jamais cru ? LA CADETTE. J'ai fait diligence. L'AÎNÉE. Ce jour précieux... LA CADETTE. Moment trop heureux ! L'AÎNÉE. Comble tous mes voeux. LA CADETTE. Quel doux espoir... L'AÎNÉE. Pour moi quelle gloire... LA CADETTE. J'ose concevoir ! L'AÎNÉE. D'être en votre mémoire ! LA CADETTE. Tant de Belles à la Cour... L'AÎNÉE. Aussi ma reconnaissance... LA CADETTE. Peuvent briguer votre amour... L'AÎNÉE. Vous assure du retour. LA CADETTE. Que je n'osais me flatter... L'AÎNÉE. Excusez mon imprudence. LA CADETTE. D'avoir su le mériter. L'AÎNÉE. Le zèle a su m'emporter. AZOR, à Pierrot. Air : Morgué, la femme qui m'aura.Je n'entends rien à ce jargon. PIERROT. Ni moi non plus, je vous répond ; Ce sont deux soeurs qui, cette nuit,Au bal ont fait du bruit ;Qui, d'abord qu'on les regardait,Croyait que l'on leur en contait ;Qui toujours minaudant ; Toujours vous minaudant ;Semblaient vous dire ; allons, Seigneur,Humanisez donc votre coeur. Bis. AZOR, aux soeurs. Air : Paris est en grand deuil.Un tel empressementMe flatte infiniment... À Pierrot.Tâche de m'en défaire. PIERROT, aux Soeurs. Le Prince, en vérité...Se trouve... très flatté... À part.Je ne sais comment faire. Air : La Carmagnole. Au Prince.Nous ne sommes pas Hors d'embarras ;Toutes vont venir,Et vous tenirMême langage ;Nous ne sommes pas, Hors d'embarras ;Toutes vont bientôt vous tomber sur les bras. Air : Du Précepteur d'amour.Il faut pour vous débarrasserDe cette foule ridicule,Il faut, vous dis-je, commencer À faire l'essai de la mule. SCÈNE XV. Les Acteurs Précédents, Cendrillon, Sa Maraine. LA MARAINE. Air : La voici, tôt décampons.Entrez donc. CENDRILLON. Non, j'ai trop peur ;Je sens palpiter mon coeur. LA MARAINE. Qui peut vous causer un tel effroi ? CENDRILLON. C'est que l'on va se moquer de moi. LA MARAINE. Point tant de discours,Avancez toujours. CENDRILLON. Guidez donc mes pas ;Ne me quittez pas. LA MARAINE. Ah ! Que de façon ! CENDRILLON. Ma Bonne, venez donc. LE CHOEUR DES FEMMES. Air : Oh, oh, tourelouribo !Quelle Nymphe se présente !Oh, oh, tourelouribo !Voyez donc qu'elle est charmante !Oh, oh, tourelouribo ! En honneur, elle m'enchante.Oh, oh ,oh, tourelouribo ! L'AÎNÉE, à Cendrillon. Air : Tarare ponpon.Que venez-vous chercher, petite téméraire ?Osez-vous vous montrer avec ces haillons-là ? LA CADETTE, à Cendrillon. Sors, ou crains ma colère. LA MARAINE. Non, elle restera. AZOR, à Pierrot. Pierrot, fais-les donc taire. PIERROT. Paix-là ! AZOR, à Cendrillon. Air : Des Proverbes.Venez, venez. À part.Que d'appas ! Qu'elle est belle ! À Cendrillon.Venez, venez ; bannissez la frayeur. À part.Quel feu nouveau vient m'enflammer pour elle !Quel nouveau trait perce mon coeur ! LA MARAINE, à Azor. Air : Dans un Couvent bienheureux.À notre téméritéDaignerez-vous faire grâce ?Et n'est-ce point trop d'audace ? AZOR. Ah ! J'en suis trop enchanté.Si quelqu'objet peut s'attendre,À m'enchaîner sous ses lois ;Vous seule y pouvez prétendre,Vous seule fixez mon choix. PIERROT, à Azor. Air : Belle Brune.Et la mule ?Et la mule ?Seigneur,Un peu moins d'ardeur,Qui trop avance, recule ; Et la mule ? Bis. À Cendrillon et aux autres. Air : Le Corbillon.Ce n'est pas assez pour lui plaire,D'avoir beaux yeux, belle bouche, beaux bras ;Jambe fine et taille légère,Sont des beautés qui ne le flattent pas. Il faut pour gagner son amitié,Un joli petit, Montrant la mule.Un petit joli,Un joli gentil petit pied. AZOR. Air : Non, je ne crois pas.Non, je ne saurais Risquer à perdre tant d'attraits ;Non, non, non, je ne sauraisRemettre au sort de si chers intérêts.Je ne veux devoir qu'à l'Amour,Le prix que j'attends en ce jour. Ce Dieu lui-même,Dans l'objet que j'aime,M'assure un bien suprême.Non, je ne sauraisRisquer à perdre tant d'attraits ; Non, non, non, je ne sauraisRemettre au sort de si chers intérêts. À Cendrillon. Air : D'Églé. Que je vous aime !Oui, je vous aime ;Mais quel fera le prix de cette ardeur extrême ?Vous pouvez d'un seul mot dissiper mes ennuis. CENDRILLON. Seigneur... AZOR. Vous balancez... parlez... CENDRILLON. Non, je ne puis. AZOR. Que je vous aime ! CENDRILLON. Eh ! Bien, oui, je vous aime. PIERROT. Air : Tout est dit.Voilà, ma foi, ce qui s'appelle,Mener l'Amour tambour battant ; Sans en faire à deux fois, la Belle,D'un plein faut, court au dénouement ;Mais laissons-les s'assurer de leurs flammes,En pareil cas, un témoin toujours nuit ;Adieu, Mesdames, Tout est dit. L'AÎNÉE. Air : Comment donc as-tu réussi ?Cette petite Cendrillon ! LA CADETTE. Cette petite Cendrillon ! LA MARAINE. De deux soeurs est-ce là le ton ?Apprenez l'une et l'autre À respecter son rang et son nom ;Ils valent bien le vôtre. Air : Bouchez, Naïades.Mais vous l'avez trop outragée ;Il est temps qu'elle soit vengée,Demeurez encor un instant, Je vais vous la faire connaître.Pour le sort le plus éclatant,Sachez que les Dieux l'ont fait naître. Air : J'ai, sans y penser.Si le Prince Azor,Voyait encor Son inconnue ?...Dans ce jeune objet,S'il la retrouvait trait pour trait ?...Un charme secretLa dérobait à votre vue ; Mais à votre amour,Je la rends en ce jour. AZOR. Air : C'est chez vous.Quoi ! C'est vousQui m'inspiriez les transports les plus doux ?Quoi ! C'est vous ?... LA MARAINE. Air : Vraiment ma Commère, oui.Reconnaissez-vous ceci ? Montrant l'autre mule. PIERROT. Vraiment, ma Commère, oui :Tenez, voilà la pareille.Quelle est donc cette merveille !Je me perds dans tout ceci. CHOEUR de M. La Ruette. AZOR, CENDRILLON, LA MARAINE. Aux plus tendres ardeurs,Livrons, livrons nos coursLivrons, livrons nos coursLivrez, livrez vos coursL'amour nous engage, L'amour vous engage,L'Hymen va nous unir,L'Hymen va vous unir,Quel plaisir ! Quel plaisir JToujours plus amoureux, Serrons, serrons, les noeuds,Serrez, serrez, les noeuds,Qui vont nous rendre heureux !Qui vont vous rendre heureux ! LES DEUX SOEURS. Aux plus noires fureurs ; Livrons, livrons nos cours ;La honte, la rage,Est notre partage ;Ah ! C'est trop en souffrir !Fuyons, fuyons ces lieux, Et délivrons nos yeux,D'un spectacle odieux. CENDRILLON. RÉCITATIF, par MONSIEUR LA RUETTE. N°1Des rigueurs d'un cruel destinAurai-je toujours à ma plaindre ?Des rigueurs d'un cruel destin, Aurai-je toujours à me plaindre ?Un faible espoir me luit ne vain, Je n'en ai pas moins tout à craindre. N°2J'ai joui cette nuit du spectacle enchanteur, Qu'étale aux yeux la Cour la plus brillante. Un prince à mes genoux exprimait son ardeur.Il ne me reste hélas ! De toute ma grandeurQu'un souvenir qui me tourmente. LA MARAINE. N°3.Ah ! Dans quel état je vous vois ! Ne cherchez point d'excuse. Je devine aisément pourquoiVous n'avez point suivi ma loi.Il est vrai ; j'en suis confuse.Oh ! Vraiment je le crois, je le crois, Mais pourquoi, mais pourquoi Ce manque de foi, ce manque de foi ?Fillette toujours raisonne,Et n'écoute personne,Quand on s'oppose à son penchant. CENDRILLON. Non, non ; c'est que, ma Bonne, C'est que, ma Bonne,Je n'ai pas pu faire autrement,Je n'ai pas pu faire autrement. LA MARAINE. N°3.Il fallait n'en croire que moi, Il fallait mieux suivre ma loi. CENDRILLON. Il est vrai : mais ma folieEst bien punie : un moment... LA MARAINE. N°3. Un moment fait effet ; on s'y plaît,On s'en fait un amusement. CENDRILLON. Pardon, ma Bonne, Pardon, ma Bonne, Je n'ai pas pu faire autrement.Oui, oui. Pardon, ma bonne,Je n'ai pas pu faire autrement,Pardon, ma Bonne, Pardon, ma BonneJe n'ai pas pu faire autrement. Air : par Mr de la Ruette. n°4Je le sais bien,J'ai tout perdu.En moins de rien tout a disparu :Que le sort me traite, S'il veut, sans pitié,Non, non, je ne regretteQue votre amitié,Non, non, je ne regrette Que votre amitié. Air : par Mr de la Ruette. n°5Les yeux vers moi tournés sans cesse,Tendrement il me regardait, Il me regardait ;De ses regards la douceur et l'ivresse,Et l'ivresse, M'inspiraient ce qu'il ressentait,M'inspiraient ce qu'il ressentait,À mes côtés est une place,Il s'en saisit ; Il s'enhardit,Je m'attendrit, Je m'attendris, Je veux le fuit, et je ne puis,Je ne veux finir, et ne puis,Je veux fuir et ne puis, Je veux le fuit, et je ne puis.Déjà mon trouble augmentait son audace, Quand minuit sonna, Et tout finit là :Déjà mon trouble augmentait son audace,Quand minuit sonna,Et tout finit là, tout finit là, tout finit là. Air : par Mr de la Ruette. n°6Amour, dont je ressens la flamme, Épargne un faible coeur qui se livre à tes coups,Épargne un faible coeur qui se livre à tes coups,Les traits dont tu blesses mon âmeSont-ils l'effet de ton courroux,Sont-ils l'effet de ton courroux ? Fais briller à mes yeux un rayon d'espérance,Ou rends moi mon indifférence,Mon sort me paraître plus doux. ==================================================