******************************************************** DC.Title = LA VEUVE INDÉCISE, OPÉRA COMIQUE DC.Author = VADÉ, Jean-Joseph DC.Creator = FIEVRE, Paul DC.Publisher = FIEVRE, Paul DC.Subject = Opéra comique DC.Subject.Classification = 842 DC.Description = Edition du texte cité en titre DC.Publisher = FIEVRE, Paul DC.Contributor = DC.Date.Issued content = DC.Date.Created = DC.Date.Modified = Version du texte du 01/02/2021 à 07:00:13. DC.Coverage = France DC.Type = text DC.Format = text/txt DC.Identifier = http://www.theatre-classique.fr/pages/documents/VADE_VEUVEINDECISE.xml DC.Source = DC.Source.cote = DC.Language scheme = UTF-8 content=fr DC.Rights = Théâtre Classique, (creative commons CC BY-NC-ND) *************************************************************** LA VEUVE INDÉCISE OPÉRA COMIQUE PARODIE DE LA VEUVE COQUETTE. 1758. PAR M. VADÉ. Représenté pour la première fois sur le théâtre de l'Opéra Comique, le 24 Septembre 1759. ACTEURS ALISON, Veuve. SUSON, sa Cousine. MATHURIN, amoureux d'Alison. COLIN, amoureux d'Alison. ACTE UNIQUE SCÈNE PREMIÈRE. ALISON. ARIETTE.D'un triste veuvageJe voudrais sortir :On peut, à mon âge,Recevoir l'hommageQu'offre le plaisir. Colin en partagePrétend m'obtenir ;Mathurin fait rage,Et veut mettre ombrageÀ son désir D'un dur esclavageL'Amour dédommage.Qui des deux choisir ?Mais je présageQue le repentir Pourrait venir. Allons à ce sujet consulter ma cousine, et profitons de ses conseils. Elle sort. SCÈNE II. Mathurin, Colin. MATHURIN. Oui, te dis je ; son penchant pour moi la détermine. COLIN. Oh ! Je suis sûr que c'est moi qu'elle va couronner. DUO. MATHURIN. N'y prétends pas.De ma richesseElle fait casN'y prétends pas. De ma richesseElle fait cas.Tiens, crois-moi, cesseCes vains débats ;N'y prétends pas. COLIN. N'y prétends pas ;Car ma tendresseVaut tes ducats.N'y prétends pas ;Car ma tendresse [Note : Ducat : Monnaie d'or et d'argent qui est battue dans les terres d'un duc, et qui vaut environ un écu en argent, et deux étant d'or. [F]]Vaut tes ducats.Je veux sans cesseSuivre ses pas;N'y prétends pas. MATHURIN. Mais quel droit as-tu pour y prétendre ? COLIN. Eh ! Quel droit as-tu, toi, de me la contester ? MATHURIN. Moi ? J'étais l'ami du défunt ; elle m'aimait aussi dès ce temps-là : ainsi j'ai pour moi l'ancienneté. COLIN. Oh ! Moi, c'est depuis son veuvage qu'elle m'aime ; ainsi j'ai pour moi la nouveauté. MATHURIN. Arrange-toi comme tu voudras, mais je n'en démordrai pas. COLIN. Ni moi non plus. MATHURIN. Eh ! Mais ! Tu veux donc te faire frotter ? COLIN. Par qui ? MATHURIN. Par moi. DUO. MATHURIN. Ah ! voyons donc ; C'est tout de bon :Pauvre garçon !Tais-toi, poltron.Commence donc :C'est tout de bon. Pauvre garçon!Tais toi, poltron,Poltron, poltron. COLIN. Tu le veux donc ?Oui, tout de bon : Pauvre garçon !Tais-toi, poltron.Commence donc :Oui, tout de bon.Tais-toi, poltron ; Tais-toi, poltron,Poltron, poltron. SCÈNE III. Alison, Suson, Mathurin, Colin. SUSON, accourant. Pourquoi donc tout ce bruit ? ALISON. Pourquoi donc tout ce vacarme ? MATHURIN. C'est lui qui veut me disputer ton coeur. COLIN. C'est lui qui prétend l'emporter sur moi. ALISON. Mais vraiment cela me fait honneur. MATHURIN. C'est votre faute aussi. ALISON. Pourquoi donc ? COLIN. Sans doute, depuis six mois que vous nous bercez d'espérance. SUSON. Ils ont raison ; pourquoi ne pas se déterminer ? ALISON. Cela t'est bien aisé à dire ; mais je considère bien des choses. SUSON. Quoi ? ALISON. Ce n'est pas un marché d'un jour ; j'ai le bonheur d'être veuve : si j'étais sûre de l'être une seconde fois, je n'y regarderais pas de si près. SUSON. Tu plaisantes, mais il faut une fin. MATHURIN. Sans doute il faut une fin. COLIN. [Note : Barguigner : se dit figurément en choses spirituelles des irrésolutions d'esprit, quand un homme a du mal à se résoudre, à donner quelque parole, à conclure une affaire, à se défaire de quelque engagement. [F]]Eh ! Faut-il tant barguigner ? Dites-nous vos sentiments une bonne fois. ALISON. ARIETTE en Dialogue.Te vais faire un heureux. SUSON. Lequel des deux.... MATHURIN et COLIN. Aimes tu mieux ? COLIN. Que mon ardeurTouche ton coeur. MATHURIN. À mon amourCède en ce jour. ALISON. Je vais choisir. MATHURIN. Ah ! Je le crois,Ce sera moi ? COLIN. Ce sera moi ;J'aurai sa foi.Décide-toi, Décide-toi. ALISON. Mais ! COLIN. Quoi ! ALISON. Mais ! MATHURIN. Quoi ! SUSON. Décide-toi. ALISON. Oh ! Non, ma foi. COLIN. Ce sera moi,J'aurai sa foi. MATHURIN. Oh ! Je le crois,Ce sera moi ? MATHURIN et COLIN. Décide-toi. ALISON. Oh ! non, ma foi. MATHURIN. Il n'y a qu'un mot qui serve. Voyons. COLIN. Que de façons ! Parlez. ALISON. Oh ! Plus vous me pressez, moins je pourrai me décider. Donnez-moi du moins le temps de réfléchir. À Mathurin. ARIETTE.Votre caractèreEst vif et sincèreVotre amour constantMérite assurément Que l'on vous préfèreÀ tout autre Amant. MATHURIN. Quel aveu charmant! COLIN. Ah ! Dieux, Quel tourment! ALISON, à Colin. Ta flamme m'est chère ; Chut ! C'est un mystère :Ton amour constantMérite assurément, Que l'on te préfèreÀ tout autre amant. COLIN. Quel retour charmant ! MATHURIN. Ô Dieux ! Quel tourment ! ALISON. Que pour me plaireChacun persévère :Peut être un bon moment Finira le mystère.Un coeur qui diffèreAgit prudemment. MATHURIN. Ingrate ! Sur un tel caprice je vais réfléchir à mon tour. Il sort. SCENE IV. Suson, Alison, Colin. SUSON. Quoi ! Toujours balancer ! COLIN. Jarni, pourquoi faut-il que je sois amoureux ? ALISON. Suson, conseille moi. COLIN. Que voulez-vous qu'elle vous dise ? C'est votre coeur qui doit vous conseiller. SUSON. C'est bien dit. Que ne prends-tu Colin ! ALISON. J'aurais bien aimé Mathurin, mais, non ; il me semble que tu as raison : Colin est mieux mon fait. Va je te prends. COLIN. Que je suis satisfait ! Oh ! Tatigoi, vous ne vous repentirez pas de la préférence que vous me donnez. ARIETTE.Oui, c'est un parti sage :Alison sait choisir ; Car je puis en ménageRemplir tout son désir.Je suis homme à l'épreuve,Un vrai mari de veuve.Demandez au Canton Si je suis bon luron,Si je suis franc garçon ;On ne vous dira pas, non :Car je puis en ménageRemplir tout son désir. Déjà mon coeur nageDans le plaisirJe suis homme à l'épreuve,Un vrai mari de veuve.Demandez au canton Si je suis bon luron,Si je suis franc garçon ;On ne vous dira pas, non ;Et tous à l'unissonVous diront : Colin est bon, Bon, bon, bon, bon. ALISON. Suson, ai-je bien fait ? SUSON. Oui, j'approuve ton choix ? ALISON. Mathurin va faire le diable. Il est riche et puissant dans le village. Il peut nous nuire, et je crains... COLIN. Ne craignez rien. Je vais l'observer. Il sort. SCÈNE V. Suson, Alison. ALISON, rêvant. Oui, oui, je serais mieux... SUSON. À quoi rêves tu ? ALISON. C'est que... SUSON. Eh ! Bien ? ALISON. C'est que... Tiens, il faut te le dire, Colin ne m'aura pas. SUSON. Bon ! Autre caprice ! Et tu viens de le lui promettre. ALISON. C'est vrai ; mais j'ai eu tort. SUSON. Que peux-tu lui reprocher. Il est jeune, il t'aime.... ALISON. Mais il n'a rien. SUSON. ARIETTE.Dans le MariageÀ quoi sert le bien ?L'Epoux qui n'a rienEst beaucoup plus sage, Est bien moins volage.L'époux qui n'a rienJamais ne partage.Un tendre langage,C'est de tout ménage Le plus doux lien.Toujours empressé.Jamais courroucé,Le mari demande ;La femme commande, Et voit les plaisirsPrévenir ses désirs. ALISON. Tu as beau dire, je crois pourtant que Mathurin ferait mieux mon affaire. SUSON. Quel esprit indécis ! ALISON. Dis-lui que je veux lui parler. SUSON. J'y cours de ce pas. Elle sort. SCÈNE VI. ALISON seule. ARIETTE.Il est convenableQu'une femme raisonnable,Quand il s'agit d'un choix, Regarde à deux fois.Colin est aimable,Je m'en aperçois ;Mais Mathurin est agréableHélas ! Pour chacun ! Mon coeur est sensible.Des deux que n'est-il possible De n'en faire qu'un ?Colin gémira;Mais enfin n'importe: Mathurin l'emporte,Il m'épousera. SCENE VII. Mathurin, Alison. MATHURIN. Suson vient de me dire que vous vouliez me parler. ALISON. Oui, cela est vrai. MATHURIN. Et est-il vrai encore ce qu'elle m'a dit ? ALISON. Quoi ? MATHURIN. Que vous aviez, enfin, rendu justice à mon amour. ALISON. Oui, cela est vrai. MATHURIN. Ah ! Si tu savais à quel point ma flamme... ALISON. Elle est entre nous mutuelle. MATHURIN. ARIETTE.Chère Alison, Mon coeur gémissait.PalpitaitDans le doute : Mais le plaisir devient bien plus flatteurPar les peines qu'il coûte.Ah ! Combien ce soir,Je vais en avoirÀ te posséder toute ! Je t'embrasserai,Te dorloterai ;Je te conterai,Je t'endormirai,Je te bercerai, Te réveillerai,Puis je te dirai,Tout ce qui te flatte :Ton oeil guilleret,Dont le feu me plaît, Autant m'en dira:Tout pour moi sera. Récitatif obligé.Je vais tout disposer pour notre Mariage. ALISON. Ne tarde pas. MATHURIN. Je reviendrai bientôt.Souffre que sur ta main mon amour prenne un gage, ALISON. Volontiers. MATHURIN. Mon rival sera ma foi bien sot. Il sort. SCÈNE VIII. Suson, Alison. SUSON. Eh ! Bien, cousine, es-tu contente ? ALISON. Oui. SUSON. Ton choix est donc fait ? ALISON. Oui. SUSON. Quel effort ! Et c'est sans retour ? ALISON. Oui, oui, ne crains rien. SUSON. Au bout du compte, tu as fort bien fait. ARIETTE.Eh ! pourquoi tant attendre,S'il faut passer par là ?Le soin de se défendre Ne sert pas de cela. C'est un meuble nécessaireQue d'avoir un époux.Au hasard pourvoyons-nous,Le choix n'avance guère.Volages et jaloux, Ils se ressemblent tous.Il nous faut au villageUn mari jeune et dodu.À cela près, femme sagePrend le premier venu. Cousine, allons de la gaieté, pense à ton hymen. ALISON. Je n'y pense que trop. SUSON. Comment ! ALISON. Je ne sais... mais... SUSON. Tu ne voudrais pas te dédire, peut-être? ALISON. Pourquoi non ? SUSON. Mais, tu deviens donc folle ? ALISON. Il y va de ma liberté. SUSON. Tout comme il vous plaira. Je ne vous conçois plus. ALISON. Qu'est-ce que cela te fait ? Tu peux t'engager, si tu veux. SUSON. Mais enfin, pour qui penches-tu ? ALISON. Je suis encore indécise. Mathurin m'aime, il est vrai. Il est riche, j'en conviens ; mais il est si délicat... Un mari comme celui-là ne durerait pas six mois. SUSON. C'est donc pourquoi il faut s'en tenir à Colin. ALISON. Mais je te l'ai dit, il n'a pas de bien. SUSON. Si ces deux-là ne te conviennent pas, cherches en un troisième. ALISON. Ne pense pas rire, chacun d'eux n'a que la moitié des qualités que je voudrais trouver dans un mari, et c'est ce qui cause mon embarras. SUSON. Il faut te décider. J'attends que tu aies fait ton choix pour faire le mien, et je m'en ennuie à la fin. ALISON. En ce cas, choisis toi-même qui tu voudras ; car je ne veux plus ni de l'un ni de l'autre. Elle sort. SCÈNE IX. SUSON, seule. ARIETTE.Un aveu méritéPénètre, enchante,Quand il est dictéPar la sincérité.La grâce touchante De l'ingénuité,Toujours augmenteLa beauté ;Mais la plus charmanteQui suit la pente De l'inégalité,N'est jamais contente;Une flamme inconstanteSans cesse épouvanteLa volupté. SCÈNE X. Suson, Mathurin, Colin. MATHURIN, à Colin. Je te fais compliment. COLIN, à Mathurin. Oh ! Je te félicite. SUSON, à part. C'est bon ; chacun de son côté s'imagine avoir réussi. MATHURIN. On se rend à tes voeux. COLIN. Point du tout ; c'est à ton mérite. MATHURIN, à part. Il pense l'épouser. COLIN. Il croit l'emporter sur moi. Parbleu ! Je veux m'en divertir. MATHURIN. Je ne puis m'empêcher de rire. SUSON. Oui, oui, le chose est fort plaisante. DUO. MATHURIN. On la lui garde,Ah ! Ah ! Ah ! Ah ![Note : Minois : Terme burlesque, qui signifie la mine, le visage de quelqu'un. [F]]Ce minois là.L'épouseraTiens, tiens, regarde Vois-tu cela ?On t'en ratissera. COLIN. C'est lui qui l'aura.Ah ! Ah ! Ah ! Ah !Ce bijou-là L'emportera.Tiens, tiens, regardeVois-tu cela ?On t'en ratissera. MATHURIN. Tiens, vois-tu : si Alison ne prononce pas en ma faveur, je perds cent écus. COLIN. J'y consens. SUSON. Hé bien ! Ils sont perdus. MATHURIN. Pourquoi donc ? SUSON. C'est qu'à vous deux ma cousine renonce. DUO. MATHURIN. Ah ! La diablesse ! Pauvre Colin !Notre tendresseA même sort,Et la tigresseNous met d'accord. Elle a tort. COLIN. Ah ! La tigresse !Pauvre Mathurin !Notre tendresseA même sort, Et la tigresseNous met d'accord.Très tort. MATHURIN. Morgué, v'là qu'est fini, je n'y pense plus. SUSON. Eh ! Bien, tiens, si tu veux..... MATHURIN. Si je veux... Oh ! Si tu veux toi-même : je ne demande pas mieux ; accepte ma main. SUSON. Ma cousine fait une sottise ; je me garderai bien de l'imiter. COLIN. Vous avez raison. À part.Bon ! Mon rival me laisse le champ libre ; quand je serai tout seul, il faudra bien qu'Alison me choisisse. Haut.Mais la voici. SCÈNE XI. Ssuson, Alison, Colin, Mathurin. SUSON. Alison, viens donc vite. ALISON. Pourquoi faut-il doubler le pas ? SUSON. Mathurin. ALISON. Mathurin. COLIN. Épouse ta cousine. ALISON. Bon ! Quel conte ! MATHURIN. Eh ! Non, non, ce n'est point un conte. ALISON. Plaît-il ? SUSON. C'est en honneur. ALISON. Ô Dieux ! ARIETTE.Quelle insolence !Quelle impudence ! Ah ! Peut-on voirUn trait plus noir.Tous trois d'intelligenceTramer mon désespoir !Au mois d'avance Il fallait savoirQue votre inconstanceRomprait l'allianceQu'on me faisait prévoir. SUSON. Dame, arrange-toi donc. Tu le veux, puis tu ne le veux plus. Après cela tu le regrettes ; on n'a jamais vu d'esprit comme le tien. ALISON. Taisez-vous. SUSON. La chose n'est pas faite ; si tu veux, je te céderai mes droits. MATHURIN, à Suson. Mais qu'est-ce que vous faites donc, vous, à votre tour ? COLIN. Pourquoi donc cela ? Vous êtes si bien ensemble ; et pargué, tenez vous y. SUSON, bas à Mathurin. Ne crains rien ; c'est pour l'amener où nous voulons. Haut à Alison.Eh bien ! Le coeur t'en dit-il ? COLIN. Fi donc, encore une fois. SUSON. Moi, je prendrai Colin. ALISON. Oui-dà. ARIETTE.Non pas, ma mie, Gardez vos noeuds ;Celui qui vous lieFlatte trop vos voeux :Je suis ravieQu'un tel amoureux Enfin justifieL'excès de vos feux.Mais moi, je veuxN'aimer de ma vie;J'en jouirai mieux. Je suis ravieQu'un tel amoureuxEnfin justifieL'excès de vos feux. COLIN. Vous avez raison ; aussi bien quand vous le voudriez, je ne le voudrais plus. ALISON. Toi ? COLIN. Non, et je vais de ce pas trouver Claudine. ALISON. Tu l'aimes donc ? COLIN. Oh ! Que cela ne vous inquiète pas. ALISON. Perfide. COLIN. À la bonne heure ; mais j'ai pris mon parti. ALISON. Écoute moi donc. COLIN. Non. ALISON. Colin ? COLIN. Adieu. ALISON. Viens donc, j'ai quelque chose à te dire. COLIN. Qu'est-ce que c'est ? ALISON, lui tendant le main. Touche-là, je te donne la préférence. COLIN. Je crois bien, parce que je suis tout seul. ALISON. Non, c'est parce que je t'aime. COLIN. Est-il bien vrai ? ALISON. Oui. COLIN. Puis-je compter sur toi ? ALISON. J'en fais serment. MATHURIN, à Colin. [Note : Jarni : ou Jarnidieu. Sorte de jurement. Les paysans de la comédie disent jarnigoi, jarnigué, jarniguienne, jerniguienne. Corruption de je renie Dieu. [L]]Si tu lui donnes encore le temps de la réflexion, elle pourrait bine se dédire. Jarni ! Prends-là au mot. COLIN. Tu as raison. À Alison.Eh bien ! C'est fait ; allons vite chez le notaire. MATHURIN. Ne faisons qu'une seule noce pour nous quatre, et vive le joie. QUATUOR. Tu m'obtiens, Je t'obtiens.Mes plaisirs sont les tiens :Plus d'alarmes ;Tous les biens,Tous les charmes, Sont dans nos liens. VAUDEVILLE. Ce Vaudeville est de M. NAU. ENSEMBLE. Air : La raison propose.Une fille à dix-huit ansA de la prudence,Sur le choix de ses amantsQuand elle balance. Lorsqu'elle est sur le retour,Et qu'on lui parle d'amour,C'est une sottiseQue d'être indécise.Pour l'hymen faut-il quitter Un amant sincère.Ce n'est pas sans hésiterSur ce qu'on va faire.Mais si chez notre vainqueurNous voyons quelque froideur, C'est une sottiseQue d'être indécise.[Note : Barbon : vieillard qui est revenu de tous les plaisirs de la jeunesse, qui les condamne et qui les empêche autant qu'il peut. [F]]Si quelque riche barbonPrès de nous soupire,Ne répondons oui ni non À ce qu'il désire.Mais si, par un bon contratIl nous assure un état,C'est une sottiseQue d'être indécise. Lorsqu'une Belle, en aimant,Cherche le mystère ;Qu'elle veut secrètementVoguer à Cythère,[Note : Petit collet : Le petit collet, la profession ecclésiastique. En mauvaise part, celui qui affectait de porter un petit collet et de se donner des manières dévotes. [L]]Entre nos petits collets [Note : Plumet : Un jeune militaire. [L]]Et tous ces fringants plumets,C'est une sottiseQue d'être indécise. COLIN, à Alison. Balancez à m'épouser,J'y consens, ma chère, [Note : Sasser : Passer le sas, par le tamis. Sasser de la farine, sasser du plâtre. [F]][Note : Bluter : Séparer la farine d'avec le son en la passant par un bluteau. [F]]Si moudre, bluter, sasserVous pouvez tout faire ;Mais puisque votre moulinNe peut aller sans Colin,C'est une sottise Que d'être indécise. AU PARTERRE.Voici le moment, Messieurs,D'une épreuve rude.Pour l'auteur et les acteursQuelle incertitude ! Par un geste de la mainDécidez notre destin.Frappez la repriseDe la Veuve Indécise. ==================================================