******************************************************** DC.Title = MON FUTUR, COMÉDIE. DC.Author = LIQUIER, Gabriel DC.Creator = FIEVRE, Paul DC.Publisher = FIEVRE, Paul DC.Subject = Monologue DC.Subject.Classification = 842 DC.Description = Edition du texte cité en titre DC.Publisher = FIEVRE, Paul DC.Contributor = DC.Date.Issued content = DC.Date.Created = DC.Date.Modified = Version du texte du 08/05/2020 à 12:57:08. DC.Coverage = France DC.Type = text DC.Format = text/txt DC.Identifier = http://www.theatre-classique.fr/pages/documents/LIQUIER_MONFUTUR.xml DC.Source = http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k93811036 DC.Source.cote = DC.Language scheme = UTF-8 content=fr DC.Rights = Théâtre Classique, (creative commons CC BY-NC-ND) *************************************************************** MON FUTUR MONOLOGUE EN VERS dit par Mademoiselle BERGÉ, de PALAIS-ROYAL. Pris : UN FRANC 1887 Gabriel LIQUIER PARIS L. FRINZINE, ÉDITEUR 112, Boulevard Saint-Germain, 112 PERSONNAGES. JEUNE FEMME .......... Mademoiselle Bergé. 1637. MON FUTUR LA JEUNE FEMME. C'est navrant ! C'est affreux ! Mais aussi c'est bine fait. J'avais maint partis à ma guise : Un jeune sénateur, un piquant sous-réfet, Un tendre diplomate au coeur plein de franchise, Un vieux duc qui le soir fait encor de l'effet, - Et je vais choisir qui ?... LE savez-vous ?... Au fait, Pourque vous le sachiez, il faut que je le dise. Disons-le donc, pour punir ma sottise. Quand je vins demeurer jadis Avez mon oncle, à Montparnasse, DE ma croisée un jour je vis Un voisin qui lorgnait d'en face. Voulait-il plaire ou plaisanter ? Était-ce un poète ? Un fumiste ?... Bientôt j'entendis tapoter : Ô bonheur ! C'était un artiste ! Je l'observai... modérément. Quand il venait à disparaître, J'entendais vibrer l'instrument Dont il jouait comme un vrai maître. « Quel talent sur le piano ! Me disais-je. Ce qui m'attriste, C'est qu'il a l'air d'un étourneau... Mais aussi, quelle âme d'artiste ! » Là-dessus, voilà qu'un beau soir, Il me demande en mariage, De près je pus enfin le voir : Il n'était pas beau ; quel dommage ! Saint-Flour : Vile de Cantal en Auvergne. Évéché. De plus, il venait de Saint-Flour L'accent un peu trop... fantaisiste. Bah ! Tant pis ! Mon rêve d'amour, C'était d'épouser un artiste ! Il devint ainsi mon futur, Et le sympathique jeune homme M'apprend tout aussitôt qu'Arthur Est l'affreux nom dont il se nomme. Arthur ! Est-ce possible ? Non, Pour le renom d'un pianiste, Un tel nom, ça n'a pas de nom !... Mais qu'importe ? C'est un artiste ! Vivre d'art ! Vivre dans le bleu ! Diner de musique et d'eau pure ! S'envole loin du pot-au-feu, Oublier jusqu'à la couture !... Il l'oubliait trop, entre nous Batiste : Toile de lin, très fine. [L] Car à ses mouchoirs de batiste J'aperçus quelques petits trous... Vain détail ! C'était un artiste ! Oui, pensais-je, un tel maestro A mille pardons peut prétendre.... MAis chez nous point de piano, Et de près je peux l'entendre. À ces conseils judicieux C'est de mon balcon que j'assiste : Qu'il me tarde de pouvoir mieux Admirer ce subtil artiste ! Mon oncle, - un Bayard retraité, - Lui dit à la bonne franquette : « Chez vous offres nous donc le thé, Vous nous jouerez de l'opérette. » « Chez moi ? » fit-il en hésitant... J'interviens alors et j'insiste. Ô triomphe ! Au bout d'un instant, Tous trois nous montions chez l'artiste. Enfin, j'allais donc à loisir Suivre l'essor de son génie, Séraphique : Qui appartient aux séraphins. Ardeur séraphique. de l'ordre des anges. Planer, - séraphique plaisir ! - Sur les ailes de l'harmonie ! Mais qu'ai-je vu ?... C'est singulier... Quel est ce truc de machiniste ?... Qu'agence-t-il à son clavier ?... Faut-il douter de mon artiste ?.... Ô risée ! Ô réveil trop dur ! Surprise horrible et prosaïque ! L'instrument où triomphe Arthur ; C'est un piano mécanique ! Il tournait, tournait, retournait Barbariste : barbarisme, on suppose, celui qui joue de l'orgue de barbarie. Péjoratif. Sa manivelle... barbariste. « - Assez ! Assez de moulinet ! » Dit mon oncle à l'étrange artiste. Mais lui, lui, pendant de temps-là, Absorbé dans sa ritournelle, Sans qu'on pût mettre le holà, Il se grisait de manivelle ! « Tout est rompu, mille tambours !... » Arthur n'entend pas, il persiste... Et tandis qu'il tourne toujours, Nous plantons là le faux artiste ! Et voilà. C'est fini. Mon pauvre prétendu ! Avoir tant pardonné, - son accent trop agreste, Son Auvergne, son nom, ses mouchoirs et le reste - Et tout enfin, hormis notre malentendu ! Pourtant il a du bon... Il met bien sa cravate... Qui sait ? Il a peut être une âme délicate... Tiens ! Tiens ! Et son esprit que je n'ai pas jugé... Et ses goûts, son humeur... Musique scélérate ! C'est toi, toi seule à qui j'avais songé !... Bah ! Pardonnons encore et soyons optimiste : Mon Arthur, j'en fais le pari, Prouvera qu'un mauvais artiste Peut faire un excellent mari. ==================================================