DIVERTISSEMENT
M. DCCC. VI.
À PARIS, Chez HUBERT et COMP°n LIB.-ÉDIT., rue des Grands Augustins, n°21.
publié par Paul FIEVRE janvier 2010
Texte établi par Paul FIEVRE
© Théâtre classique - Version du texte du 30/11/2022 à 23:14:21.
PERSONNAGES.
GRAND CHOEUR.
PETIT CHOEUR.
DÉESSE.
CHOEUR DES PEUPLES.
UNE SUIVANTE DE LA DÉESSE.
LE TEMPS.
L'AMOUR.
LES AMANTS.
Extrait de "OEUVRES INÉDITES DE M. LE PRÉSIDENT HÉNAULT", 1806. pp 363-374.
LE TEMPLE DES CHIMÈRES.
Le théâtre représente le Temple des Chimères ; la Déesse des Chimères y paraît sur un trône de nuages brillants. On voit à ses pieds et autour d'elle ses sujets les Désirs, l'Espérance, la Confiance, les Songes, l'Imagination, etc. Les ailes du théâtre sont composées de masques, de figures fantastiques, de bulles de savon, d'ailes de papillons, etc...
SCÈNE PREMIÈRE.
La Déesse des Chimères sur son trône, Suite de la Déesse.
GRAND CHOEUR.
Que les voeux des mortels pour vous se réunissent,
Ils ne doivent qu'à vous les biens dont ils jouissent.
PETIT CHOEUR.
Vous rendez à leurs coeurs,
Par un mensonge aimable,
5 | Le bonheur véritable, |
Dont ils ont perdu les douceurs ;
Et votre bonté secourable
De tant de biens perdus a sauvé leurs erreurs.
Jupiter vous doit son tonnerre,
10 | Vous forgez les traits de l'Amour; |
Ces fleurs qui brillent sur la terre
Sont des amants par vous rendus au jour.
GRAND CHOEUR.
Que les voeux des Mortels pour vous se réunissent,
Ils ne doivent qu'à vous les biens dont ils jouissent.
LA DÉESSE.
15 | Venez, mortels, venez tous ; |
Ma puissance féconde
Enferme en ce séjour tous les trésors du monde,
Choisissez, tout est à vous.
SCÈNE II.
Les Peuples de tous pays et de tous états viennent à la voix de la Déesse des Chimères, Acteurs de la scène précédente.
CHOEUR DES PEUPLES.
Chantons, chantons les dons d'une main immortelle ;
20 | C'est pour nous rendre heureux que sa voix nous appelle. |
Danse des Peuples.
LA DÉESSE descendue de son trône.
Ce qu'on voit ici paraître
Est l'ouvrage des désirs ;
Vous y sentirez renaître
Mes trésors et vos plaisirs.
25 | Venez-y forger vous-même |
Ce qui peut vous rendre heureux j
Je mets mon pouvoir suprême
À laisser agir vos voeux.
Ce qu'on voit ici paraître
30 | Est l'ouvrage. des désirs ; |
Vous y sentirez renaître
Mes trésors et vos plaisirs.
Si votre âme s'est méprise
En faisant un premier choix ;
35 | Qu'elle n'en soit pas surprise , |
Revenez une autre fois.
Ce qu'on voit ici paraître
Est l'ouvrage des désirs ;
Vous y sentirez renaître
40 | Mes trésors et vos plaisirs. |
On danse.
UNE SUIVANTE DE LA DÉESSE.
Faisons de nos beaux jours
Un prompt usage ;
La jeunesse et les amours
Sont du même âge.
45 | Du doux printemps, les fleurs |
Sont le partage ;
Et la saison des faveurs,
C'est le bel âge.
LE CHOEUR reprend :
Faisons de nos beaux jours
50 | Un prompt usage, |
La jeunesse et les Amours
Sont du même âge.
VOIX SEULE.
Qu'au matin de ses jours
Chacun s'engage,
55 | On voit dormir les Amours |
Au soir de l'âge.
Hâtez-vous à l'Amour
De rendre hommage ;
Vous aimerez sans retour,
60 | Dans un autre âge. |
LE CHOEUR reprend :
Faisons de nos beaux jours, etc.
On danse.
On entend une symphonie sombre.
LA DÉESSE.
Qu'entends-je ? Quels lugubres sons
Interrompent nos jeux et nos douces chansons ?
Ah ! De nos ennemis c'est le plus redoutable ;
65 | C'est le Temps qui s'offre à mes yeux. |
SCÈNE III.
Le Temps avec sa suite, le Repentir, les
Réflexions , les Vents , etc.
Acteurs de la Scène précédente.
LA DÉESSE.
Où vas-tu, vieillard indomptable ?
Quel sujet t'amène en ces lieux ?
LE TEMPS.
J'y viens pour dissiper cette vapeur épaisse.
Qui cache à tous les yeux l'aimable vérité ;
70 | C'est trop jouir de leur crédulité , |
Il est temps qu'à la fin l'univers vous connaisse.
LA DÉESSE ET LE CHOEUR.
Tout flatte ici leurs voeux.
Tout flatte ici nos voeux.
Que viens-tu leur offrir de mieux ?
75 | Que viens-tu nous offrir de mieux ? |
LE TEMPS.
Tout vous flatte, il est vrai, mais rien ne vous contente ;
Ne vous lassez-vous point d'une inutile attente ?
Pensez-vous que le coeur puisse vivre au hasard,
Et qu'on ne soit heureux à moins qu'on ne sommeille ?
80 | Songez que dans ces lieux tout est l'effet. de l'art: |
N'attendez pas qu'enfin le regret vous éveille,
Vous vous réveilleriez trop tard.
LA DÉESSE.
Je crains peu tes conseils, mes sujets sont fidèles.
LA DÉESSE ET LE CHOEUR.
Tout flatte ici leurs voeux.
85 | Tout flatte ici nos voeux. |
Que viens-tu leur offrir de mieux ?
Que viens-tu nous offrir de mieux ?
LE TEMPS.
À mes commandements vos âmes sont rebelles,
Il faut par mon pouvoir vous dessiller les yeux.
90 | Ministres de mes lois ! Au défaut de la foudre, |
Détruisez ce palais jusqu'en ses fondements ;
Faites voler en poudre
Tous ces vains ornements.
Les ministres du Temps, le Repentir, les Réflexions, les Vents détruisent le palais ; le trône s'en va enfumée ; les ailes du théâtre s'évanouissent et ne laissent plus voir que des ruines ; les nuages dorés tombent en pluie ; les Désirs, l'Espérance, les Songes, tout s'envole ; le Temps reste seul avec la Déesse et les Peuples.
SCÈNE IV.
Le Temps, La Déesse et Les Peuples.
LE TEMPS.
Eh bien, ces lieux vous plaisent-ils encore ?
95 | Dépouillés de l'éclat dont l'erreur les colore, |
Ils ne vous offrent plus que de tristes débris.
De mes conseils enfin , connaissez tout le prix.
Le Temps part.
CHOEUR DES PEUPLES EFFRAYÉS.
Où sommes-nous ? Quelle surprise étrange !
En un instant notre sort change !
SCÈNE V.
La Déesse, Les Peuples.
LA DÉESSE.
100 | Va, je redoute peu tes impuissants projets : |
Et vous, ne craignez rien, le Temps ne peut me nuire,
Il m'accuse de vous séduire,
C'est me reprocher mes bienfaits.
Mais pour m'en bien venger, votre coeur doit suffire.
105 | Qu'il ose à ma puissance opposer son empire, |
Qu'il abatte des murs, des tours, et des palais ;
J'en relèverai plus qu'il n'en pourra détruire.
Demeurez, et vous allez voir
Ici plus que jamais éclater mon pouvoir.
On danse.
110 | Répandez, belle Flore , |
Vos parfums les plus doux.
Jeune Aurore,
Levez-vous,
Trompez un jaloux ;
115 | Céphale vous attend encore, |
Levez-vous.
Hâtez-vous de paraître ,
Embellissez les cieux ;
La nature pour renaître,
120 | N'attend qu'un regard de vos yeux. |
Toi qui fais toute ma magie,
Qui fondais mon empire, en recevant la vie,
Toi que je mis au rang des Dieux,
Viens, enfant de mon art, Amour , descends des cieux.
SCÈNE VI.
Le théâtre change, les cieux s'ouvrent, et l'Amour en descend, accompagné de Génies sous la forme des Jeux, des Ris et des Grâces.
L'AMOUR.
125 | J'allumai le flambeau du jour , |
Le monde me doit sa naissance ;
Tout serait détruit sans l'Amour,
Bien n'eût été sans une puissance.
Former toujours d'heureux désirs ,
130 | Me les présenter pour offrande, |
Suivre les jeux et les plaisirs ,
C'est tout le prix que je demande
Différents Quadrilles d'amants arrivent sur la scène.
DANSE DES AMANTS CONSTANTS ET DISCRETS.
Le Dieu qu'ici l'on adore,
Est le plus discret des Dieux ;
135 | Il veut qu'ailleurs on ignore |
Comme on le sert en ces lieux.
Il aime un culte sincère
Qu'on se plaît à renfermer ;
C'est le moyen de lui plaire,
140 | Que de n'oser le nommer. |
LE CHOEUR.
Le Dieu qu'ici l'on adore , etc.
UN AMANT DU MÊME QUADRILLE.
Le Dieu qui reçoit nos hommages
Aime les sombres forêts ;
Il n'entre en ces bocages
145 | Que des bergers discrets. |
Nos seuls traits,
Pour vaincre une belle,
Sont une ardeur fidèle
Et des feux discrets.
150 | Ces bois chéris |
Sont peuplés d'amants favoris ;
Vénus y vient toutes les nuits
Voir Adonis.
le Dieu qui reçoit nos hommages,
155 | Aime les sombres forêts ; |
Il n'entre en ces bocages
Que des bergers discrets.
Danse des Amants volages.
UN AMANT DU QUADRILLE DES AMANTS VOLAGES.
Le Dieu des Amants
Se lit des serments
160 | Que l'on fait aux belles ; |
Il les abandonne aux ailes
Aux ailes
Des vents.
On danse.
Qu'importe à l'Amour ?
165 | Qu'on soit à sa cour |
Constant ou volage !
Il lui suffit de l'hommage
De l'hommage
D'un jour.
LA DÉESSE ET L'AMOUR.
170 | Amants constants, Amants volages, |
Accordez-vous dans ces lieux pleins d'appas,
Le doux plaisir y vole sur vos pas ;
Le bonheur vous unit, unissez vos hommages.
LE CHOEUR.
Accordons-nous dans ces lieux pleins d'appas,
175 | Le doux plaisir y vole sur nos pas ; |
Le bonheur nous unit, unissons nos hommages.
On danse.
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