CONVERSATION
XCIV.
XCVIII.
AVEC PRIVILÈGE DU ROI.
PAR RENÉ BARY, Conseiller et Historiographe du Roi.
À PARIS, Chez CHARLES DE SERCY, au Palais, dans le salle Dauphine, à la Bonne-Foi couronnée.
Texte établi par Paul FIÈVRE, octobre 2023
Publié par Paul FIEVRE, novembre 2023
© Théâtre classique - Version du texte du 30/09/2024 à 21:19:33.
ACTEUR.
ARISTIDE.
MESSENE.
Texte extrait de "L'esprit de cour, ou Les conversations galantes , divisées en cent dialogues, dédiées au Roi.", René Bary, Paris : de C. de Sercy, 1662. pp 167-171.
DE LA ROTURE
CONVERSATION.
Aristide flatte Messene qui est noble, sur ce qu'elle aime un homme qui n'est pas gentilhomme.
MESSENE.
Quelle faiblesse ! La plupart des personnes s'imaginent que la vertu n'est pas noble dans un sujet roturier !
ARISTIDE.
Si la Noblesse était un véritable bien, elle perfectionnerait toujours ceux qui la possèdent ; mais elle ne sert souvent qu'à rendre leurs sottises plus remarquables.
MESSENE.
J'ai fait les mêmes observations, et je ne feins point de dire les mêmes choses.
ARISTIDE.
Atagene ne paye point de pancarte, il paye de vertu.
MESSENE.
L'une vaut mieux que l'autre.
ARISTIDE.
Il ne faut pas éplucher un homme en son origine , il se faut éplucher en ses moeurs, je ne connais que de réputation celui dont vous approuvez la recherche : mais si la voix publique n'est point menteuse, l'on peut dire qu'il est plein d'esprit, qu'il est plein de coeur, et que s'il n'est né gentilhomme, il fait ce que les gentilshommes doivent faire.
MESSENE.
Les Hommes de cette volée obéissent quelquefois à ceux auxquels ils devraient commander ; s'ils ont beaucoup de semblables en naissance, ils ont peu de pareils en mérite ; et leurs actions sont d'autant plus considérable , qu'ils ne doivent point à leurs ancêtres la noblesse de leurs aiguillons.
ARISTIDE.
Ceux qui sont heureusement nés n'ont pas besoin d'être excités par le dehors, ils le font assez par le dedans ; ils ne regardent, point le passé, ils regardent l'avenir ; ils ne se proposent point d'être imitateurs, ils se proposent d'être imités.
MESSENE.
Lorsque vous parlez des hommes qui ont une heureuse naissance, vous parlez de vous-même ; et lorsque vous parlez de vous-même, vous m'entretenez d'une personne dont les vertus entretiennent toute l'Europe.
ARISTIDE.
Vous croiriez être ingrate, si ayant donné des louanges à Atagene, vous n'en donniez à Aristide : mais vous me permettrez de vous dire, Madame, que quelque juste que vous soyez, vous vous écartez de la médiocrité, et qu'en pensant éviter la méconnaissance, vous tombez dans l'hyperbole.
MESSENE.
Je ne puis accorder les louanges que vous me donnez avecque les louanges que vous ne voulez pas recevoir. Si je juge bien des choses, pourquoi rejetez vous mes éloges ? Et j'en juge mal, pourquoi faites-vous mon panégyrique ?
ARISTIDE.
Vous jugez solidement de toutes choses ; mais toutes vos paroles ne correspondent pas toujours à votre jugement.
MESSENE.
Vous voulez dire peut-être que les sentiments qu'on n'exprime point, diffèrent quelquefois de ceux qu'on exprime.
ARISTIDE.
Je veux dire la même chose.
MESSENE.
Il est vrai que ce que vous dites arrive quelquefois ; mais je vous jure sur ma foi que je vous regarde comme un homme extraordinaire, et qu'à votre respect mes paroles font mes véritables pensées.
ARISTIDE.
Après cela, Madame, j'aurais mauvaise grâce de douter du mérite de ma personne aussi vous priai-je de croire que j'ajoute foi présentement à tout ce que vous avez dit à son avantage ; et que quand même j'aurais des défauts extrêmement visibles, mon jugement respecterait le vôtre.
PRIVILÈGE DU ROI.
Louis par le Grâce de Dieu, Roi de France et de Navarre : À nos âmés et Féaux conseillers les gens tenant nos cours de Parlement, requêtes de notre Hôtel et du Palais, Baillifs, sénéchaux, leurs lieutenants, et tous autres nos officiers et justiciers qu'il appartiendra, salut. Notre cher et bine aimé le sieur RENÉ BARY, nous a fait exposé qu'il a fait un livre intitulé, L'Esprit de Cour, ou les belles conversations, lequel il désirerait faire imprimer, s'il nous plaisait lui accorder nos lettres sur ce nécessaires. À CEs CAUsEs, Nous lui avons permis et permettons par ces présentes, de faire imprimer, vendre et débiter en tous les lieux de notre Royaume, le susdit livre en tout ou en partie, en tels volumes, marges et caractères que bon lui semble, pendant sept années, à commencer du jours que chaque volume sera achevé d'imprimer pour le première fois, et à condition qu'il en sera mis deux exemplaires dans notre Bibliothèque publique, un ne celle de notre château du Louvre, vulgairement appelé le Cabinet des Livres, et un en celle de notre très cher et féal le sieur séguier Chancelier de France, avant de les exposer en vente ; et à faute de rapporter ès mains de notre âmé et féal Conseiller en nos conseils, Grand Audiencier de France, en quartier, un récépissé de notre Bibliothèque, et du sieur Cramoisy, commis par nous du chargement de la délivrance actuelle desdits exemplaires, Nous avons dès à présent déclaré ladite permission d'imprimer nulle, et avons enjoint au syndic de faire saisir tous les exemplaires qui auront été imprimés sans avoir satisfait les clauses portées par ces présentes. Défendons très expressément à toutes personnes, de quelque condition et qualité qu'elles soient, d'imprimer, faire imprimer, vendre ni débiter le susdit livre en aucun lieu de notre désobéissance durant ledit temps, sous quelque prétexte que ce soit, sans le consentement de l'exposant, à peine de confiscation de ces exemplaires, de quinze cent livres d'amende, et de touts dépends, dommages et intérêts. Voulons qu'aux copies des présentes collationnées par l'un de nos âmés et féaux conseillers et secrétaires du Roi, foi soit ajoutée comme à l'original. Commandons au premier notre Huissier ou sergent sur ce requis, de faire pour l'exécution des présentes tous exploits nécessaires, sans demander autre permission ; Car tel est notre bon plaisir ; nonobstant oppositions ou appellations quelconques, Clameur de Haro, Charte Normande, et autres lettres à ce contraires. Donné à Paris le quinzième jour de décembre, l'an de grâce mille six cent soixante et un, et de Notre règne le dix-neuvième. signé, par le Roi en son conseil, MOUsTIER, et scellé du grand sceau de cire jaune.
Registré sur le livre de la Communauté le 10 , mars 1662, suivant l'arrêt de la Cour de Parlement du 8 avril 1653. signé DEBRAY, syndic.
Ledit sieur BARY a cédé et transporté son droit de privilège à Charles de Sercy Marchand Libraire à Paris, pour en jouir suivant l'accord fait entre eux.
Achevé d'imprimer pour la première foi le 24 jour de mars 1662. Les exemplaires ont été fournis
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