DE L'ENTREVUE AMOUREUSE

CONVERSATION

XXXV.

XCVIII.

AVEC PRIVILÈGE DU ROI.

PAR RENÉ BARY, Conseiller et Historiographe du Roi.

À PARIS, Chez CHARLES DE SERCY, au Palais, dans le salle Dauphine, à la Bonne-Foi couronnée.


Texte établi par Paul FIÈVRE, octobre 2023

Publié par Paul FIEVRE, novembre 2023

© Théâtre classique - Version du texte du 30/09/2024 à 21:19:51.


ACTEUR.

LE PRINCE.

LA PRINCESSE.

Texte extrait de "L'esprit de cour, ou Les conversations galantes, divisées en cent dialogues, dédiées au Roi.", René Bary, Paris : de C. de Sercy, 1662. pp 208-212.


DE L'ENTREVUE AMOUREUSE

L'entrevue d'un grand Prince et d'une grande Princesse, qui se fit à.... lorsqu'une des plus grandes Reines du Monde revint de son Voyage de.......

LE PRINCE.

Si l'on doit juger de la douleur de l'éloignement par le plaisir de la présence ; vous pouvez bien croire, Madame, que votre absence a fait les plus tristes jours de ma vie, puisque je ne vois rien de beau qui puisse conserver auprès de vous cette charmante qualité, et qu'on est extrêmement sensible à la privation des choses qu'on aime extrêmement.

LA PRINCESSE.

J'aurais mauvaise grâce, Monsieur, de douter de votre amitié ; vous avez fait toutes les avances d'un amant, et il serait indécent à un Prince comme vous, de paraître plein de franchise, et d'être plein de dissimulation : aussi ne feindrai-je point de vous dire, qu'en qualité de crédule et de sensible, j'ai pris part à la part que vous avez prise aux petits accidents qui me sont arrivés, et que l'impatience que l'avais de vous faire civilité sur votre tristesse, a été une des plus rudes souffrances de mon voyage.

LE PRINCE.

Quoi que je sois ravi, Madame, que votre bonté s'intéresse en ce qui me regarde, je suis pourtant fâché qu'elle vous ait fait passer de mauvaises heures.

LA PRINCESSE.

Comme votre tendresse faisait vos déplaisirs, il était juste que la mienne fit mes ressentiments.

LE PRINCE.

Que ne doit-on point espérer d'une Princesse si considérante et si humaine ?

LA PRINCESSE.

Que ne doit-on point attendre d'un Prince si sensible et si bon ?

LE PRINCE.

Je ne vous dirai point, Madame, que l'honneur que vous me faites excède mon mérite ; j'offenserais en votre personne un jugement dont je fais tous les jours les éloges : je vous dirai seulement que la passion de vous plaire occupe toutes mes pensées, et que si l'on peut parvenir à la possession de vos bonnes grâces par l'extrémité de la passion, je puis espérer d'être un jour la moitié de vous-même.

LA PRINCESSE.

Le désir de me plaire ne doit point vous inquiéter ; Pour peu qu'on vous connaisse, l'on peut se vanter de connaître une personne fort aimable.

LE PRINCE.

Après l'avantage d'être si bien auprès de vous, que mon ambition peut-elle désirer ?

LA PRINCESSE.

Je ne m'étonne pas de ce que vous faites tant d'état de l'affection de votre cousine ; les Dames font vaines , et le Prince est galant.

LE PRINCE.

On dit que les effets vérifient les rôles : si cela est, comme il n'en faut pas douter, ou toutes les puissances du Monde conspireront contre mon dessein ; ou les événements vous apprendront, Madame, que je regarde vos vertus comme quelque chose de merveilleux, et que je constitue même le souverain bonheur de mes jours en l'honneur de votre amitié.

LA PRINCESSE.

Quoi qui arrive, le Prince fera toujours le plaisir de mes yeux, et les émotions de mon coeur les charmes de mon imagination, et le sujet de mes belles heures.

LE PRINCE.

Je vis dans cette confiance.

LA PRINCESSE.

Vous mourrez dans ce sentiment.

LE PRINCE.

Agréable confirmation ! Il n'y a point de paroles plus favorables, il n'y a point de réponse plus satisfaisante.

 


PRIVILÈGE DU ROI.

Louis par le Grâce de Dieu, Roi de France et de Navarre : À nos âmés et Féaux conseillers les gens tenant nos cours de Parlement, requêtes de notre Hôtel et du Palais, Baillifs, sénéchaux, leurs lieutenants, et tous autres nos officiers et justiciers qu'il appartiendra, salut. Notre cher et bine aimé le sieur RENÉ BARY, nous a fait exposé qu'il a fait un livre intitulé, L'Esprit de Cour, ou les belles conversations, lequel il désirerait faire imprimer, s'il nous plaisait lui accorder nos lettres sur ce nécessaires. À ces causes, Nous lui avons permis et permettons par ces présentes, de faire imprimer, vendre et débiter en tous les lieux de notre Royaume, le susdit livre en tout ou en partie, en tels volumes, marges et caractères que bon lui semble, pendant sept années, à commencer du jours que chaque volume sera achevé d'imprimer pour le première fois, et à condition qu'il en sera mis deux exemplaires dans notre Bibliothèque publique, un ne celle de notre château du Louvre, vulgairement appelé le Cabinet des Livres, et un en celle de notre très cher et féal le Sieur Séguier Chancelier de France, avant de les exposer en vente ; et à faute de rapporter ès mains de notre âmé et féal Conseiller en nos conseils, Grand Audiencier de France, en quartier, un récépissé de notre Bibliothèque, et du sieur Cramoisy, commis par nous du chargement de la délivrance actuelle desdits exemplaires, Nous avons dès à présent déclaré ladite permission d'imprimer nulle, et avons enjoint au syndic de faire saisir tous les exemplaires qui auront été imprimés sans avoir satisfait les clauses portées par ces présentes. Défendons très expressément à toutes personnes, de quelque condition et qualité qu'elles soient, d'imprimer, faire imprimer, vendre ni débiter le susdit livre en aucun lieu de notre désobéissance durant ledit temps, sous quelque prétexte que ce soit, sans le consentement de l'exposant, à peine de confiscation de ces exemplaires, de quinze cent livres d'amende, et de touts dépends, dommages et intérêts. Voulons qu'aux copies des présentes collationnées par l'un de nos âmés et féaux conseillers et secrétaires du Roi, foi soit ajoutée comme à l'original. Commandons au premier notre Huissier ou sergent sur ce requis, de faire pour l'exécution des présentes tous exploits nécessaires, sans demander autre permission ; Car tel est notre bon plaisir ; nonobstant oppositions ou appellations quelconques, Clameur de Haro, Charte Normande, et autres lettres à ce contraires. Donné à Paris le quinzième jour de décembre, l'an de grâce mille six cent soixante et un, et de Notre règne le dix-neuvième. signé, par le Roi en son conseil, MOUsTIER, et scellé du grand sceau de cire jaune.

Registré sur le livre de la Communauté le 10 , mars 1662, suivant l'arrêt de la Cour de Parlement du 8 avril 1653. signé DEBRAY, syndic.

Ledit sieur BARY a cédé et transporté son droit de privilège à Charles de Sercy Marchand Libraire à Paris, pour en jouir suivant l'accord fait entre eux.

Achevé d'imprimer pour la première foi le 24 jour de mars 1662. Les exemplaires ont été fournis


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