CONVERSATION
XV.
XCVIII.
AVEC PRIVILÈGE DU ROI.
PAR RENÉ BARY, Conseiller et Historiographe du Roi.
À PARIS, Chez CHARLES DE SERCY, au Palais, dans le salle Dauphine, à la Bonne-Foi couronnée.
Texte établi par Paul FIÈVRE, octobre 2023
Publié par Paul FIEVRE, novembre 2023
© Théâtre classique - Version du texte du 30/09/2024 à 21:20:02.
ACTEUR.
DORIMENE.
CARILE.
Texte extrait de "L'esprit de cour, ou Les conversations galantes, divisées en cent dialogues, dédiées au Roi.", René Bary, Paris : de C. de Sercy, 1662. pp 99-102.
DU BAL
Carile demande à une fort belle fille la permission de lui donner le Bal.
CARILE.
C'est être bien hardi, Mademoiselle, que de vous prier, de souffrir que je vous donne le bal : je sais bien que cette faveur est un avantage qui n'est dû qu'à des personnes d'importance, aussi ne vous demandais-je cette grâce qu'avecque beaucoup de crainte : mais si la passion de témoigner à tout le monde, j'estime particulière que je fais de votre mérite, mérite quelque chose, il est à croire que je ne rougirai point de votre refus, que je ne me plaindrai point de votre réponse.
DORIMENE.
Vous pouviez faire un plus beau choix, vous voyez cent filles qui effacent toutes les autres.
CARILE.
Je souffre avec peine votre modestie, elle offense toutes les grâces, elle injurie toutes les vertus ; et si une autre que vous parlait contre vous, mes yeux ne lanceraient que des foudres, et ma bouche ne prononcerait que des imprécations.
DORIMENE.
La même glace qui découvre mes défauts, découvre votre flatterie.
CARILE.
Je ne reçois point votre glace pour juge, elle n'est à mon avis, ni assez nette, ni assez unie : je ne reçois point non plus vos yeux pour le même office ; la fréquente vue de votre aimable personne les a rendus comme insensibles : je reçois pour arbitres de notre différend, tous ceux qui se mettent de juger des belles choses.
DORIMENE.
Les plus indifférents louent les Dames.
CARILE.
À ce que je vois, vous ne voulez point de tiers.
DORIMENE.
Vous l'avez deviné.
CARILE.
Ma foi, à le bien prendre, vous avez raison de refuser l'arbitrage, puisque pour peu qu'on devienne votre observateur, l'on devient votre soupirant.
DORIMENE.
Encore que ma passion ne soit pas d'en donner, je souhaiterais d'être aux yeux de l'assemblée ce que je suis aux vôtres.
CARILE.
Si votre souhait est accompli, vous ne serez pas moins la Reine des coeurs, que la reine du bal.
DORIMENE.
Je ne souhaite d'éclater, qu'afin que votre aveuglement n'éclate point.
CARILE.
Que ma passion ne vous engage point à faire ces sortes de souhaits : si je ne suis accusé de défaut de jugement que parce que je vous élève, je ne serai condamné que parce qu'on vous envie.
PRIVILÈGE DU ROI.
Louis par le Grâce de Dieu, Roi de France et de Navarre : À nos âmés et Féaux conseillers les gens tenant nos cours de Parlement, requêtes de notre Hôtel et du Palais, Baillifs, sénéchaux, leurs lieutenants, et tous autres nos officiers et justiciers qu'il appartiendra, salut. Notre cher et bine aimé le sieur RENÉ BARY, nous a fait exposé qu'il a fait un livre intitulé, L'Esprit de Cour, ou les belles conversations, lequel il désirerait faire imprimer, s'il nous plaisait lui accorder nos lettres sur ce nécessaires. À ces causes, Nous lui avons permis et permettons par ces présentes, de faire imprimer, vendre et débiter en tous les lieux de notre Royaume, le susdit livre en tout ou en partie, en tels volumes, marges et caractères que bon lui semble, pendant sept années, à commencer du jours que chaque volume sera achevé d'imprimer pour le première fois, et à condition qu'il en sera mis deux exemplaires dans notre Bibliothèque publique, un ne celle de notre château du Louvre, vulgairement appelé le Cabinet des Livres, et un en celle de notre très cher et féal le Sieur Séguier Chancelier de France, avant de les exposer en vente ; et à faute de rapporter ès mains de notre âmé et féal Conseiller en nos conseils, Grand Audiencier de France, en quartier, un récépissé de notre Bibliothèque, et du sieur Cramoisy, commis par nous du chargement de la délivrance actuelle desdits exemplaires, Nous avons dès à présent déclaré ladite permission d'imprimer nulle, et avons enjoint au syndic de faire saisir tous les exemplaires qui auront été imprimés sans avoir satisfait les clauses portées par ces présentes. Défendons très expressément à toutes personnes, de quelque condition et qualité qu'elles soient, d'imprimer, faire imprimer, vendre ni débiter le susdit livre en aucun lieu de notre désobéissance durant ledit temps, sous quelque prétexte que ce soit, sans le consentement de l'exposant, à peine de confiscation de ces exemplaires, de quinze cent livres d'amende, et de touts dépends, dommages et intérêts. Voulons qu'aux copies des présentes collationnées par l'un de nos âmés et féaux conseillers et secrétaires du Roi, foi soit ajoutée comme à l'original. Commandons au premier notre Huissier ou sergent sur ce requis, de faire pour l'exécution des présentes tous exploits nécessaires, sans demander autre permission ; Car tel est notre bon plaisir ; nonobstant oppositions ou appellations quelconques, Clameur de Haro, Charte Normande, et autres lettres à ce contraires. Donné à Paris le quinzième jour de décembre, l'an de grâce mille six cent soixante et un, et de Notre règne le dix-neuvième. signé, par le Roi en son conseil, MOUsTIER, et scellé du grand sceau de cire jaune.
Registré sur le livre de la Communauté le 10 , mars 1662, suivant l'arrêt de la Cour de Parlement du 8 avril 1653. signé DEBRAY, syndic.
Ledit sieur BARY a cédé et transporté son droit de privilège à Charles de Sercy Marchand Libraire à Paris, pour en jouir suivant l'accord fait entre eux.
Achevé d'imprimer pour la première foi le 24 jour de mars 1662. Les exemplaires ont été fournis
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